Investissements
Le «Financial Times» a enquêté sur McKinsey Investment Office, la filiale d’investissement du cabinet de consultants. Elle gère 9,5 milliards de dollars appartenant à des associés et anciens associés. Avec des risques de conflits d’intérêt

Il n’y a probablement que quelques initiés qui étaient au courant. Depuis une trentaine d’années, le cabinet de consultants McKinsey dispose de sa propre filiale d’investissement McKinsey Investment Office (MIO Partners). L’entité, qui occupe 80 personnes entre New York, Londres, Munich et Singapour, gère quelque 9,5 milliards de dollars.
Jusqu’à ce lundi, où le Financial Times a publié une grande enquête sur ce hedge funds secret, qui investit pour le compte des associés – et d’anciens associés – de la firme. Mais pas tous. Il faut disposer d’une fortune nette d’au moins un million de dollars. Ces placements représentent la moitié du fonds, l’autre moitié est liée aux retraites des employés de McKinsey.
Investir incognito
Opérant parfois incognito avec des noms de compte protégeant son identité, la société n’est pas seulement très opaque – difficile de savoir dans quoi elle investit, les associés figurant au conseil ne le mentionnent pas dans leur bio officielle –, elle est aussi très performante. Son fonds principal a été surnommé par un client cité par le quotidien londonien, les «joyaux de la couronne». Le Compass Special Situations Fund, un fonds de hedge funds, a généré un rendement positif lors de 24 années sur 25 d’existence, sortant indemne de la bulle internet et de la crise financière. Selon des données collectées par la société de recherche Hedge Funds Research, les hedge funds ont en moyenne connu cinq années de pertes au cours de la même période.
De quoi soulever une série de questions, notamment liées au risque de conflit d’intérêt. McKinsey dispose d’informations uniques sur de nombreuses entreprises et industries en raison de ses services de conseils de stratégies, souligne le FT. Contacté, le cabinet souligne considérer les questions éthiques «extrêmement sérieusement». Un porte-parole explique que MIO opère sur une base de «confiance aveugle», c’est-à-dire que MIO ne connaît pas les clients de McKinsey et les conseillers de McKinsey ne connaissent pas les investissements de MIO. De même, un porte-parole de l’entité d’investissement assure qu’il y a une «politique rigoureuse pour éviter les conflits d’intérêts».
Reste que le réseau d’alumni de McKinsey joue un rôle, d’abord parce que certains anciens y investissent encore ou parce que MIO a investi dans des fonds gérés par des anciens du cabinet. Ce réseau est l’un des grands atouts de la firme, car il compte des représentants dans les plus hautes fonctions de grandes entreprises ou de gouvernements. En Suisse, Tidjane Thiam, patron de Credit Suisse, en fait partie. De même que Sheryl Sandberg, responsable opérationnelle de Facebook ou le directeur général de la banque Morgan Stanley.