Au procès d'UBS, des banquiers bien loin de leurs clients
Justice
L’ultime journée du procès parisien d’UBS aura lieu ce jeudi. Les avocats de la grande banque auront la parole. Mercredi, ceux de ses anciens dirigeants ont tout fait pour les dissocier de leurs clients fraudeurs

Un haut responsable d’UBS n’a pas, ne doit pas, et ne cherche pas à s’occuper dans le détail des clients de la banque, qu’il ne rencontre d’ailleurs que rarement. Tel est, en résumé, le portrait que leurs avocats ont dressé mercredi dans leurs plaidoiries, à Paris, de Raoul Weil et de Dieter Kiefer.
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Le premier, acquitté aux Etats-Unis en novembre 2014, était le patron de sa division Wealth Management de 2004 à 2007. Le second, son subordonné, dirigeait de 2006 à 2009 la division Europe de l’Ouest. Tous deux sont poursuivis pour «démarchage bancaire ou financier illicite» et «blanchiment aggravé de fraude fiscale».
«Un galimatias de procédure»
Tous deux risquent la prison avec sursis et des amendes (24 mois et 500 000 euros pour Weil, 18 mois et 400 000 euros pour Kiefer). Et tous deux, selon leurs défenseurs, méritent la relaxe vu l’absence de preuves et le désastre de l’instruction: «La réalité? Un galimatias de procédure […], l’indigence de l’accusation, la vacuité de l’ordonnance de renvoi devant le tribunal constellée de titres accrocheurs, une présentation mensongère, des témoins malhonnêtes…» a tonné Me Xavier Autain, avocat de Raoul Weil. Lequel s’est retrouvé devant le tribunal «parce qu’il fallait un chef à cette fable, une tête de gondole à ce storytelling».
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Les failles du dossier sont bien réelles, surtout quand il s’agit d’impliquer directement les six prévenus physiques. Chaque coup de boutoir ébranle un peu plus les réquisitoires. Mais l’essentiel de cette avant-dernière journée – conclusion ce jeudi avec UBS AG et UBS France – était ailleurs: quelle responsabilité exerçaient les deux hommes? Que savaient-ils des avoirs détenus des clients français? Kiefer? «Il n’a ouvert aucun compte. Il n’a mis en place aucun service, n’a jamais donné d’instruction. Il n’y a pas contre lui le commencement d’un acte de dénonciation», assène son avocate Me Julia Stasse. Weil? «Il n’a jamais commis le moindre démarchage, jamais été en contact avec le moindre client», poursuit Me Autain.
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Mur édifié entre UBS et ses clients
L’affaire est emballée. Entre la direction d’UBS qui distribuait les copieux bonus et les clients qui se croyaient à l’abri du secret bancaire, un mur est édifié. On doit y croire. En douter, c’est tomber dans «l’esprit de système du Parquet financier» dénoncé par les avocats, pour qui les lanceurs d’alerte ne sont que des «délateurs» réglant leurs comptes «ignominieux». Pour la banque suisse, réglementée au cordeau, un tel dossier plein «d’approximations sans aucune rigueur» apparaît presque, en fin de plaidoiries, comme une insulte.