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Produits structurés. La théorie du regret dans l'acte d'investir

La peur de l'investisseur, celle de rater une hausse future ou de subir une perte, conduit à des décisions peu rationnelles.

Un investisseur achète, sur recommandation d'un ami, des actions de Sonic Foundry. Une société qui ne lui est pas familière et qui présente, paraît-il, un grand potentiel dans le domaine technologique. Après quelques mois, le cours de l'action a chuté de plus de 50%. Ne tenant pas à perdre davantage d'argent, l'investisseur vend les titres à perte, ce qu'il regrette. Il décide dorénavant de vérifier très minutieusement toute nouvelle recommandation d'action de son ami.

L'investisseur changerait pourtant totalement de comportement, s'il n'avait pas suivi le conseil de placement de son ami et si le prix de l'action avait augmenté de 50%. Il se montrerait dès lors moins réticent à prendre des risques et achèterait chaque action que lui conseillerait son ami, ne fût-ce que pour ne pas avoir à regretter le bénéfice manqué. Dans le cadre des placements, la peur de regretter quelque chose plus tard rend soit l'investisseur peu enclin à prendre des risques, soit au contraire le motive à prendre des risques plus importants.

La «théorie du regret» (en anglais Regret Theory) fait apparaître, d'une manière générale, que la peur de regretter quelque chose plus tard joue un rôle important dans la dissuasion de poser un acte. Le regret est une douleur émotionnelle que nous ressentons lorsqu'une décision prise antérieurement s'avère erronée par la suite.

L'effet de disposition

Le regret joue un rôle prépondérant dans les décisions de placement. Considérons les deux investisseurs suivants: A a acheté, il y a longtemps, des actions X au prix de 100 CHF, B au prix de 200 CHF. Hier, le titre affichait 160 CHF et aujourd'hui 150 CHF. Lequel des deux s'irritera le plus du recul du cours. Probablement l'investisseur B, vu que pour lui, l'action enregistre une perte. L'investisseur A perçoit ce mouvement du cours simplement comme une baisse de bénéfice. Supposons que les deux investisseurs aient besoin de liquidités pour effectuer un achat. Lequel des deux investisseurs vendra sa position en actions à cet effet. L'investisseur A procédera à la vente et réalisera un bénéfice, tandis que l'investisseur B préférera renoncer à cet achat, plutôt que de réaliser une perte. La joie que déclenche la (prétendue) bonne décision chez l'investisseur A est la contrepartie du sentiment de regret suscité par les pertes. Ensemble, elles font en sorte que les investisseurs réalisent les bénéfices et ne se préoccupent pas des pertes. Cet effet s'appelle l'effet de disposition.

Les incidences sur le risque lié à la transaction

Comme le montre l'exemple ci-dessus, les investisseurs se mettent à calculer leurs points de référence en termes de gain et de perte. Au départ, il s'agit du prix d'acquisition. Toutefois, au fil du temps, les points de référence sont inconsciemment revus et corrigés. La hauteur à laquelle le cerveau fixe ce point de référence définit également dans une large mesure la perception de joie ou de regrets lors de la vente d'une position en actions. Des études montrent qu'un record récemment atteint par un cours est souvent utilisé comme point de référence.

Terrance Odean a analysé en 1998 le comportement de placement de quelque 10000 investisseurs aux Etats-Unis. Les gains réalisés ont incontestablement été plus nombreux que les pertes. Ceci surprend d'autant plus si l'on tient compte du fait qu'aux Etats-Unis les gains en capital peuvent être taxés et les pertes déduites.

Les investisseurs préfèrent non seulement réaliser des gains, mais ils les réalisent en outre trop tôt. A l'inverse, les pertes sont négligées trop longtemps. Ce qui implique que les actions vendues continuent d'enregistrer de bonnes performances, tandis que les actions conservées poursuivent leur tendance à la baisse. Un autre aspect de ce phénomène psychologique se manifeste également dans d'autres situations de marché. Les nouvelles positives qui stimulent le cours de l'action incitent les investisseurs à vendre. On parle de «la vente des gagnants». En revanche, les mauvaises nouvelles n'engendrent pas la vente de la position, ce que l'on désigne par la «conservation des perdants». Chez les investisseurs, on observe que les nouvelles économiques positives n'ont pas déclenché de vente analogue de leurs actions. Il s'agit là d'une expression intéressante du sentiment de regret. Si l'investisseur peut attribuer la baisse du prix de l'action à certains facteurs indépendants de sa volonté ou de sa base décisionnelle, il ne ressentira que peu de regrets et prendra des décisions plutôt rationnelles.

Conseils aux investisseurs rationnels

Les agissements émotionnels expliquent pourquoi les investisseurs gagnent moins d'argent sur les marchés des actions qu'ils ne le pourraient. Ces facteurs «humains» montrent toutefois aussi pourquoi de nombreux portefeuilles gérés activement ne dépassent pas leur indice de référence. Les connaissances relatives à ces aspects psychologiques contribuent à obtenir de meilleurs rendements pour le portefeuille à plus long terme. A cet effet, vous devez, en tant qu'investisseur, prendre en compte quelques points:

Réalisez les pertes et ne vous préoccupez pas des gains. Les regrets et l'orgueil mènent à des décisions irrationnelles. Prenez par conséquent des décisions de placement indépendantes des impulsions à court terme.

Demandez-vous si l'argent pourrait être investi de manière plus rentable (coûts d'opportunité). Prenez conscience de vos points de référence. S'agit-il en l'occurrence d'une valeur réaliste? Lorsque vous avez identifié la raison pour laquelle vous investissez et les risques que vous pouvez supporter, vous investirez avec succès.