Selon vous l'Europe n'échappera donc pas au ralentissement économique américain?
Nous n'avons jamais souscrit à cette idée d'un découplage. En trente ans cela n'est arrivé qu'une fois: au début des années 90. Et encore, ceci était dû à la réunification allemande. Cette déconnexion est d'autant moins probable que la crise actuelle prend racine dans l'industrie financière, la plus globalisée qui soit. Sans compter que tous les indicateurs économiques européens commencent déjà à ralentir. Selon nous, le ralentissement économique reste global et synchrone.
Quid de l'attitude de la Banque centrale européenne?
A mon sens, la BCE n'aurait pas décidé d'augmenter ses taux en juillet si elle avait eu conscience de la gravité de la situation économique. Sans compter qu'elle ne peut rien faire contre l'inflation provoquée par la hausse du pétrole. Et que l'inflation sur laquelle elle peut espérer avoir pris reste, in fine, intrinsèquement lié à la croissance... qui ralentit. La BCE ne pourra donc que réduire ses taux, peut-être au début de 2009.
D'autres produits obligataires sortent du purgatoire: ceux dérivés du marché hypothécaire, par lesquels la crise est arrivée. Faut-il déjà y revenir?
C'est un choix difficile. Par prudence, nous aimons les obligations affichant une duration longue - comme les emprunts d'Etat - mais nous sommes attirés par ces produits qui offrent des rémunérations fantastiques. Leur prix est d'autant plus intéressant que les grandes banques ont souvent dû se débarrasser en masse de produits qui sont loin d'être tous toxiques! Leurs prix sont tellement attractifs que nous avons commencé à en racheter. Nous restons cependant prudents car il est difficile de prévoir le point bas de ce marché, qui peut receler des mauvaises surprises dans les mois à venir. Nous disons donc à nos clients que ces instruments recèlent des perspectives intéressantes mais que nous ne sommes pas entièrement sûrs de la date d'entrée idéale sur ce marché.
*Responsable de la gestion obligataire européenne chez Black Rock