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A quoi les banques du futur vont-elles ressembler?

Les établissements financiers sont plus que jamais confrontés à l’arrivée de nouvelles technologies. Applications pour mobiles, vidéoconférences, robots gérants: leur façon de travailler ne cesse d’évoluer. Alors à quoi ressembleront les banques du futur?

Pour Antoine Verdon, il n’y a pas l’ombre d’un doute: la banque du futur permettra avant tout à ses clients de faire toutes les opérations imaginables en ligne. — © MARTIN RUETSCHI
Pour Antoine Verdon, il n’y a pas l’ombre d’un doute: la banque du futur permettra avant tout à ses clients de faire toutes les opérations imaginables en ligne. — © MARTIN RUETSCHI

Comme d’autres secteurs avant elles (musique, hôtellerie, médias), les banques doivent faire face depuis quelques années à l’arrivée de nouvelles technologies. Et avec elles, à l’arrivée de nouveaux concurrents. Certains observateurs se demandent même si les banques historiques survivront à la révolution numérique en cours. Ou, au contraire, s’il faut s’attendre à voir émerger de nouveaux acteurs dominants (Google, Apple, Alibaba).

Une chose est sûre: les banques ne peuvent plus faire abstraction des avancées technologiques aujourd’hui. Même les banques privées s’y mettent et parlent désormais de fintechs et d’applications. Car non seulement les clients sont demandeurs, mais en plus elles semblent apporter des solutions économiques en cette période de hausse des coûts et de réduction des marges. Dans son rapport 2016 sur les banques de détail, Boston Consulting Group (BCG) estime que les meilleurs acteurs dans le numérique génèrent un résultat avant impôts par client 50% plus élevé que la moyenne.

Mais à quoi ressembleront les banques du futur au juste? Les agences et les conseillers sont-ils voués à disparaître au profit d’applications, de robots et d’hologrammes? Ces questions taraudent les professionnels du secteur depuis plusieurs années. Car le futur c’est demain, voire aujourd’hui.

Dans un rapport consacré aux banques en 2020, le cabinet d’audit PwC les imaginait comme ceci: une femme prend son train le matin pour se rendre au travail. Elle s’intéresse tout d’abord aux derniers mouvements effectués sur son portefeuille d’actions grâce à des lunettes intelligentes. Elle consulte ensuite un message de son banquier qui lui propose d’ouvrir un compte épargne pour son fils de 13 ans. Elle passe enfin en revue des offres pour l’achat d’une télévision, dont l’une émane de sa banque, et choisit pour finir de recourir à un prêt alternatif (pair-à-pair), toujours en ligne, pour se l’acheter. Plus tard son banquier la conseille, par vidéoconférence, sur le développement de sa petite entreprise. Connaissant ses centres d’intérêt dans les moindres détails, il lui propose un produit financier qui, une fois utilisé, entraînera le versement d’un don à une œuvre de charité.

Pour se forger cette vision du futur, PwC a sondé les responsables de 560 institutions financières dans 17 pays différents. Et le moins que l’on puisse dire, c’est que toutes les grandes tendances s’y retrouvent.

100% en ligne

A commencer par le tout numérique. Pour Antoine Verdon, membre du think tank bancaire de Swisscom E-foresight, il n’y a pas l’ombre d’un doute: la banque du futur permettra avant tout à ses clients de faire toutes les opérations imaginables en ligne. Et cela de manière indépendante, sans l’aide d’un conseiller. Que ce soit effectuer des paiements, organiser ses finances, gérer son patrimoine ou souscrire à un emprunt hypothécaire.

«La dernière barrière est tombée au mois de janvier quand la Finma a décidé de permettre aux clients de s’identifier en ligne», explique-t-il. Depuis, il est possible pour tout résident en Suisse d’ouvrir un compte sans devoir se déplacer dans une agence bancaire; à tout moment et partout grâce à son smartphone ou à sa tablette. «On peut même signer numériquement des documents», précise-t-il encore.

Et ce n’est pas tout. Ces plateformes informatiques permettront également de dialoguer avec un conseiller bancaire à des heures où les guichets sont généralement fermés depuis longtemps. Certaines banques proposent d’ailleurs déjà des services de chat ou de vidéoconférence. Des banques privées ont elles aussi développé des applications à l’intention de leurs clients.

Selon BCG, les banques les plus performantes au niveau numérique ont vu le nombre d’interactions à distance avec leurs clients doubler entre 2012 et 2015. Avec, sans surprise, des interactions par téléphone mobile qui ont le plus progressé.

Le paiement mobile

L’avenir des banques se situe aussi dans le paiement mobile. Pas étonnant dès lors que les deux applications développées avec l’aide d’établissements suisses, Paymit et Twint, aient décidé de fusionner en début d’année, soit quelques mois avant qu’Apple Pay ne débarque en Suisse.

Après l’e-banking qui permettait de payer ses factures sans bouger de son canapé et les systèmes de paiement en ligne qui profitaient aux fournisseurs de cartes de crédit et aux marchands de chaussures 2.0, voilà maintenant que l’on peut faire ses courses au supermarché ou rembourser son ami au coin de la rue sans sortir son porte-monnaie. Et à l’aide de son seul téléphone portable.

Mieux encore. Les améliorations à venir sont nombreuses, promettent les experts. Pour preuve, les smartphones peuvent déjà se transformer en des terminaux qui acceptent les cartes de crédit.

Une nouvelle directive européenne, qui doit entrer en vigueur début 2018, permettra de franchir une étape supplémentaire. Elle autorisera à des fournisseurs tiers de services financiers d’accéder aux bases de données des banques. «Ainsi, des tiers pourront fournir des interfaces vous permettant de gérer votre compte indépendamment des outils d'e-banking fournis par la banque, souligne Antoine Verdon. Et ce dernier de préciser qu’il existe déjà aujourd’hui «des services utilisant des robots qui se connectent directement sur votre compte en ligne et effectuent des paiements à votre place, sans passer par une carte de crédit.» De quoi reléguer les banques à leur simple rôle de coffre-fort? Pas si sûr.

Le conseil et la gestion automatisés

Car les innovations technologiques ne se limitent pas au seul paiement mobile ni à la vidéoconférence. Elles ont aussi permis de déléguer la gestion des portefeuilles à des robots qui recourent à des algorithmes pour faire des investissements en fonction de critères prédéfinis par les clients. Ces outils informatiques assurent le contrôle quotidien du portefeuille et génèrent même des propositions pour améliorer les placements.

Les clients pourront également – et peuvent déjà dans certains cas – choisir de recevoir sur leur portable des alertes de vente ou d’achat en cas de variation du prix d’une action. Mais aussi des analyses de la banque ou d’experts indépendants sur des thématiques particulières. «Je pense que pour les clients, recourir à un robot ou à un conseiller sera un choix personnel, explique Antoine Verdon. Et que les deux voies seront possibles pour toutes les transactions imaginables.»

Dans le rapport 2015 de BCG, le directeur associé senior Axel Reinaud assurait toutefois que le conseiller serait toujours un personnage central au sein des banques, «parce qu’il apporte une forte valeur ajoutée aux clients lorsque leurs besoins sont complexes, lors de la structuration d’un projet immobilier par exemple». A l’inverse, les opérations plus simples, comme les simulations ou la constitution d’un dossier, peuvent être gérées directement sur Internet ou le mobile, poursuivait-il.

Cette automatisation du conseil et de la gestion, combinée avec une automatisation croissante des processus administratifs, devrait en tout cas profiter aux banques qui pourront demander à leurs conseillers, délestés d’une certaine charge de travail, de s’occuper davantage du côté relationnel avec les clients. Mais aussi, peut-être, d’un plus grand nombre de clients.

Les réseaux sociaux

La révolution numérique va de pair avec l’arrivée d’une nouvelle génération – la génération Y en l’occurrence – qu’il s’agira pour les banques de séduire et d’attirer. Or, cette génération est par définition née avec un téléphone portable entre les mains et n’a, pour ainsi dire, jamais rencontré de banquier dans la vie réelle.

Par conséquent, et même si les établissements financiers sont encore frileux quand il est question de s’afficher sur les réseaux sociaux, cela devrait bientôt changer. «Des applications telles que WhatsApp et Facebook Messenger serviront de plateforme aux entreprises pour interagir avec leurs clients, affirme Antoine Verdon. Aux Etats-Unis, elles se positionnent également en tant que services de paiement indépendants des banques, en offrant à leurs utilisateurs la possibilité d’échanger des paiements directement dans l’application.»

Les financements alternatifs

Le monde hyper-connecté est aussi celui de l’économie participative à laquelle le secteur bancaire n’a pas échappé. De nouvelle formes de financement sont apparues, à commencer par le crowdfunding, qui représente déjà un marché de 12 milliards de dollars aux Etats-Unis.

En Suisse, les banques sont encore peu nombreuses à s’intéresser à ces prêts alternatifs qui profitent avant tout à de petits entrepreneurs ayant besoin de financement. Mais elles devront certainement s’y intéresser davantage si elles ne veulent pas se couper d’une certaine catégorie de clientèle. Elles pourraient également profiter de la réglementation qui limite le prêt de pair-à-pair à 20 investisseurs en dehors des banques. «Il y a un grand potentiel», estime Antoine Verdon.

La gestion du Big Data

Ce n’est un secret pour personne, les banques sont assises sur une véritable mine d’or. Il ne s’agit pas de l’argent liquide ni des lingots entreposés dans leurs sous-sols mais plutôt des données qu’elles ont collectées, depuis des décennies, sur leurs clients.

Les banques devront bien évidemment respecter les réglementations et les lois en matière de protection des données. Elles devront également s’efforcer de conserver la confiance que leur accordent les clients. Mais il est toutefois à parier qu’elles feront en sorte d’utiliser au mieux cette mine d’or et, surtout, de la monétiser d’une façon ou d’une autre.

Car les banques savent ce que leurs clients dépensent et quelles sont leurs habitudes en matière de consommation. Elles n’auront aucun problème à trouver des partenaires commerciaux avides de ce type d’informations. «On peut très bien imaginer que trois ans après l’achat d’un aspirateur par exemple, soit à la fin de son cycle de vie, vous receviez une offre spécifique pour un nouvel appareil», explique Antoine Verdon.

L’avenir des agences

Mais que l’on se rassure, les banques ne sont pas vouées à devenir des marchands d’électroménager. Elles ne vont pas disparaître non plus. Leur tâche principale sera toujours de mettre à l’abri, et de faire foisonner si possible, les avoirs de leurs clients.

A l’ère du numérique, même les agences bancaires ont de l’avenir. «Pour répondre aux attentes toujours plus complexes de leurs clients, les banques devront devenir bioniques et offrir le bon mélange entre les technologies numériques et le contact humain», écrivaient les consultants de BCG en 2015.

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