La prudence est toutefois de mise avec de telles positions courtes. Car, comme nous venons de le décrire, en cas de hausse du cours des actions, la vente à découvert entraînera une perte. Etant donné qu'en théorie, la valeur d'une action peut augmenter de manière infinie, les pertes seraient elles aussi illimitées avec une position courte, alors qu'avec une position longue, la perte est limitée au seul capital investi.
La génération d'alpha
Les techniques Long et Short visent donc une réduction du risque de marché. Ce dernier n'étant toutefois pas forcément éliminé complètement, la position nette peut présenter une corrélation importante avec les placements traditionnels. Nombre de ces stratégies, que l'on peut trouver en sous-jacents à certains produits structurés, affichent ainsi une exposition nette longue (net long exposure), c'est-à-dire que la valeur des positions longues est supérieure à celle des positions courtes. Il existe ainsi des stratégies présentant des expositions très diverses au marché des actions, donc avec un risque bêta plus ou moins important, ce qui permet à l'investisseur d'opter pour celle qui correspond le mieux à ses attentes sur le marché. En effet, plus le choix se porte sur une exposition nette longue élevée, plus l'on est favorable à la progression des marchés sur l'horizon du placement en question.
Avec une stratégie de marché neutre, on vise une exposition au marché des actions (bêta) égale à 0 en équilibrant l'exposition longue et l'exposition courte. Cela favorise une évolution de cours largement indépendante de celle du marché, d'où la désignation de stratégie de marché neutre. La corrélation entre une telle stratégie et le marché des actions est généralement très faible. Par conséquent, la performance dans ce cas relève exclusivement d'une gestion active et non de l'évolution du marché dans son ensemble. Le rendement de la stratégie résulte de la différence entre le rendement des positions longues et celui des positions courtes et est appelé alpha. Cela correspond à la plus-value réalisée par la sélection des titres ou marchés sous-jacents.
Le graphique illustre de manière simplifiée le mode de fonctionnement d'une stratégie de marché neutre, avec des positions longues et courtes respectives de 100 CHF (correspondant chacune à 100%). L'hypothèse est que la position longue augmente de 5% et que les actions en position courte sont en hausse de 3%. Il en résulte alors un rendement de +2% (100%*5% - 100%*3%) de cette stratégie Long/Short.
L'un des avantages d'une stratégie en actions Long/Short consiste à pouvoir procéder non seulement à une sélection positive d'actions attrayantes, mais également à la sélection négative d'actions peu intéressantes. Il est possible d'obtenir de la sorte un surplus de performance par rapport à un indice de référence et ce, pour les deux parties de l'investissement.
L'intégration d'une stratégie de marché neutre est extrêmement bénéfique pour le profil risque/rendement d'un portefeuille. Le recours à un tel produit lui adjoint en effet de l'alpha pur - par opposition à un placement traditionnel, représentant une combinaison d'alpha et de bêta (rendement du marché). Grâce à la très faible corrélation avec les actifs traditionnels, investir dans un produit de marché neutre Long/Short peut accroître la diversification et diminuer ainsi le risque global du portefeuille. Dans les marchés baissiers notamment, l'évolution de valeur stable qu'induit une telle stratégie est séduisante. Sa construction neutre en termes de marché fait que cet élément ne sera pratiquement pas affecté en cas d'évolution négative des cours, mais exercera un effet stabilisateur sur la valeur du portefeuille. On notera toutefois que si l'adjonction d'une telle composante peut entraîner une volatilité plus faible du portefeuille dans son ensemble, elle fait aussi encourir d'autres risques. Ainsi, les risques opérationnels se révèlent souvent plus élevés que dans le cas des placements traditionnels. De surcroît, il peut aussi exister un risque de contrepartie non négligeable. Enfin, l'investisseur doit également tenir compte de l'effet de levier (leverage) résultant de l'utilisation de fonds empruntés.
Mathias Maradan est responsable institutionnel Suisse romande, Wegelin & Co. Banquiers Privés.
Thomas Pfiffner: Stratégies quantitatives, Wegelin & Co. Banquiers Privés.
Le prochain volet de notre série traitera de la volatilité dans une optique de création de performance. Les articles peuvent être téléchargés sur: http://www.wegelin.ch et http://www.letempsfinance.ch