Le retour de l’inflation aux Etats-Unis entraînera des remous sur les marchés obligataires
Obligations
Outre-Atlantique, l’inflation sous-jacente est déjà proche de l’objectif visé par la Réserve fédérale. En Allemagne, la hausse des prix, bien que timide, devrait atteindre 1% en fin d’année, son plus haut niveau depuis 2014

Au fil des semaines, le terme inflation revient toujours plus fréquemment dans les commentaires des analystes. Sur un an et en données brutes, l’inflation aux Etats-Unis s’est accélérée à 1,5% le mois dernier, son plus haut niveau depuis octobre 2014. L’inflation sous-jacente, hors prix de l’énergie et de l’alimentation, s’est, elle, établie à 2,2% en septembre, après 2,3% en août. Malgré ce léger recul comparé au mois précédent, la hausse des prix hors énergie et alimentation dépasse désormais les 2%, l’objectif visé par la Réserve fédérale (Fed), depuis maintenant presqu’un an outre-Atlantique. Cette situation ne passe pas inaperçue chez les spécialistes.
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«L’inflation est de retour aux Etats-Unis», estime Thomas Gitzel, chef économiste chez VP Bank dans une note récente. Les effets liés aux cours du pétrole, qui exerçaient auparavant une pression à la baisse sur les prix, disparaissent peu à peu. «Cela va continuer de monter durant les prochains mois», pronostique l’économiste qui estime que cette évolution ouvre la porte un peu plus grande à un relèvement des taux par la Fed en décembre.
«Chocs de taux» attendus
Aux yeux de BBGI Group, l’inflation pourrait devenir le nouveau facteur déterminant pour les marchés de taux. «Les marchés se sont habitués à des chiffres d’inflation très bas depuis quelques années, mais nous pensons que cela va clairement changer en 2017», souligne la société dans sa dernière analyse hebdomadaire. Elle estime que les facteurs endogènes (les salaires) et exogènes (prix des matières premières) pourraient se combiner l’an prochain pour pousser les indices de prix au-dessus des objectifs des banques centrales. Aux Etats-Unis, les hausses des salaires ne sont certes pas spectaculaires mais leur progression atteint tout de même 2,6% sur un an. «Des réajustements rapides d’anticipations pourraient provoquer des chocs de taux significatifs sur les marchés obligataires au cours des prochains trimestres», prévient la société. A ses yeux, les taux longs américains, trop bas, sont «susceptibles d’enregistrer prochainement une correction sensible». Les taux à dix ans du Trésor pourraient remonter à 2% au cours des six prochains mois, comparé à un niveau de 1,75% mardi.
Rebond des prix en Allemagne
Sur le Vieux Continent, la situation n’est pas comparable, compte tenu de la faible du marché de l’emploi. Néanmoins, «la remontée de l’inflation est aussi un facteur observable» en Europe, poursuit BBGI Group, rappelant que la Banque centrale européenne anticipe une hausse des prix de 1,2% en 2017.
Outre-Rhin, la Bundesbank a estimé lundi que le taux d’inflation à la fin de 2016 pourrait remonter au-dessus de 1% en Allemagne, cela pour la première fois depuis plus de deux ans et demi.
Une remontée de l’inflation en Europe, bien que partant d’un niveau bien inférieur, pourrait avoir un important impact sur les marchés obligataires. «Les taux sont proches de zéro ou négatifs dans l’absolu. Ils sont donc encore plus vulnérables à des prises de profits ou à toutes autres formes de réallocation des risques», avertit BBGI Group. Cela ne serait pas la première fois: au printemps 2015, les rendements du Bund outre-Rhin avaient bondi de moins de 0,2% à 1% en mai et juin, faisant ainsi brusquement chuter les prix des emprunts d’Etat allemands.
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Pour Saxo, la réduction du soutien apporté par différentes banques centrales à l’économie ne se passera pas sans grabuge. Selon l’institut danois connu pour ses pronostics souvent pessimistes, il faut s’attendre à une hausse des prix, à une croissance plus faible et un dollar fort, «soit à peu près un cocktail parfait pour une récession».