Le responsable de Trafigura arrêté la semaine dernière à l’aéroport de Sao Paulo fait également l’objet d’une procédure pénale en Suisse, a appris Le Temps vendredi. Et cela depuis plusieurs mois. L’information a été confirmée par le Ministère public de la Confédération (MPC).

Interdiction de quitter le territoire brésilien

Membre de la direction de Trafigura depuis septembre 2014, Mariano Marcondes Ferraz a été arrêté le 26 octobre alors qu’il s’apprêtait à prendre un vol pour Londres. Il a été remis en liberté jeudi après avoir été auditionné par le juge fédéral Sergio Moro, en charge du scandale Petrobras, et s’être acquitté d’une caution de 3 millions de réales (895 000 francs). Son passeport lui a toutefois été retiré et il reste sous le coup d’une interdiction de quitter le territoire brésilien.

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Selon la presse brésilienne, Mariano Marcondes Ferraz aurait accepté de collaborer avec la justice de son pays. Il aurait également admis avoir payé plus de 800 000 dollars (824 000 francs) de pots-de-vin à l’ancien directeur des approvisionnements de Petrobras, Paulo Roberto Costa. Arrêté en mars 2014, ce dernier était passé aux aveux quelques mois plus tard, expliquant comment l’argent versé par des entreprises souhaitant obtenir des contrats avec Petrobras avait servi à arroser des hommes d’affaires et des politiciens brésiliens.

Des virements effectués à Genève

Retour à Mariano Marcondes Ferraz. Ce Brésilien d’origine, qui a fait ses gammes chez Marc Rich et Glencore, a rejoint Trafigura et Genève, où le géant du négoce de matières premières est installé, en 2007. Il aurait toutefois déménagé par la suite à Londres avec sa deuxième femme, une actrice très connue au Brésil.

Une décision de la justice brésilienne datant du 26 octobre – jour de son arrestation – et disponible en ligne, indique qu’il s’est rendu onze fois au siège de Petrobras entre 2010 et 2014. Et que Trafigura a conclu, entre 2003 et 2015, des contrats à hauteur de 178 millions de dollars avec Petrobras, que ce soit pour la location de navires ou l’achat de produits dérivés pétroliers.

Ce document révèle surtout que Mariano Marcondes Ferraz a payé durant des années des pots-de-vin au gendre de Paulo Roberto Costa via un compte appartenant à une société offshore, «Ost Invest & Finance», auprès de la banque privée genevoise Lombard Odier. Rien qu’en 2013, quelque 446 840 dollars et 52 800 euros y ont été versés, selon ce document.

60 procédures ouvertes en Suisse

Mariano Marcondes Ferraz n’agissait toutefois pas seulement pour le compte de Trafigura au Brésil. Il y est également l’un des responsables de la société Decal, active dans le stockage de produits pétroliers.

Alors que risque Trafigura? L’enquête du MPC devra non seulement déterminer si Mariano Marcondes Ferraz a agi de façon délictueuse mais également si la société a pris «toutes les mesures d’organisation raisonnables et nécessaires» pour éviter la commission d’infractions, comme le stipule le code pénal suisse. En cas contraire, elle s’exposerait à des poursuites pénales ainsi qu’à une amende pouvant atteindre 5 millions de francs.

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Contacté vendredi, l’avocat de Trafigura n’a pas souhaité commenter une procédure en cours. Tout comme la banque Lombard Odier. De son côté, le MPC avait indiqué au mois de mars avoir ouvert 60 procédures pénales en lien avec le scandale Petrobras et fait bloquer quelque 800 millions de francs dans une quarantaine d’établissements.