20%, 30%, 50%… du montant maximal affiché par chaque compte en fonction de sa date d’ouverture. Le taux des amendes est fixé. Pas le montant à partir duquel elles seront calculées. Le chiffre de 30 milliards de dollars d’argent américain non déclaré a circulé ces derniers mois. La page 6 de l’accord souligne qu’il pourra notamment «être réduit du montant, en dollars, de chaque compte au sujet duquel la banque peut prouver» que le bénéficiaire en a avoué l’existence au fisc américain «suite à [ses] notifications». Dès son préambule, le texte rappelle en outre que «l’autorité helvétique de supervision financière» – c’est-à-dire la Finma – va «encourager toutes les banques à contacter par courrier les particuliers et structures disposant d’un compte en lien avec les Etats-Unis». Afin «d’attirer leur attention» sur l’accord du 29 août. Et sur la possibilité qui leur est donnée d’aller se livrer au fisc. En clair, que tout est fini.
«La base de calcul devra de toute façon être documentée par la banque; d’autre part, ses clients qui se sont engagés dans une procédure de «voluntary disclosure» lui ont également demandé des documents pour pouvoir défendre leur cas», réagit Luc Thévenoz.
Une chose est sûre, «le travail va être considérable pour les banques», admet le responsable du Centre de droit bancaire et financier. En page 4, l’accord relève notamment que les banques devront préparer des listes avec entrée ou sortie sur les comptes. Ces cinq dernières années. En précisant à qui ils étaient destinés.
Employés déshabillés
Rien ne semble protéger les employés de banques d’éventuelles poursuites dans ce texte, pour une raison simple: il «ne s’applique pas aux individus». En page 4, il est ainsi exigé que les banques – qui souhaitent obtenir la promesse de n’être pas poursuivies aux Etats-Unis à l’avenir – fournissent les «noms et fonctions de chaque chargé de clientèle, conseiller, gérant de fortune, conseiller financier, trustee, fiduciaire, mandant, avocat, comptable ainsi que toute autre personne physique ou morale ayant agi» en lien avec les comptes américains fermés entre août 2008 et fin 2013.
«Le paradoxe de ce texte est peut-être bien qu’à aucun moment il ne fait état de la protection des individus… alors qu’il vise précisément à obtenir des informations sur des individus», relève Luc Thévenoz. Selon ce dernier, les employés de banques ne bénéficieront que de «la protection très relative» de leur convention collective. Qui prévoit par exemple que la banque les informe si leur nom est communiqué à la justice américaine. Pas plus.
Pas de blanc-seing
Une promesse de non-poursuite judiciaire n’est pas le Graal. Le Département de la justice américain prévient en page 5 de l’accord que les établissements devront conserver «les données liées à leurs activités américaines durant dix ans». Pour contre-enquête. Attention néanmoins. «Même s’il est difficile de mesurer l’étendue des concessions arrachées par la Suisse lors des négociations, ce point en reflète peut-être une», relève paradoxalement Luc Thévenoz. A savoir «la possibilité pour une banque de passer de la catégorie 3 à la catégorie 2». En clair, une banque qui révélerait avoir disposé de dépôts américains non déclarés – alors qu’elle a d’abord assuré le contraire – pourrait bénéficier d’un recours, avant d’être ciblée par les tribunaux outre-Atlantique. Elle pourrait demander à un vérificateur indépendant de refaire le point sur sa clientèle, pour le compte de Washington.
Vers un nouveau clash?
Le tout puissant Department of Justice conclut son édit en se réservant le droit de piétiner l’accord conclu; «si la Suisse ne réussit pas à encourager [ses] banques» à s’y plier. Ou «si des obstacles juridiques limitent [leur] participation». Ce qui menacerait à nouveau les établissements de procès en cascade.
Depuis dix jours, Berne – et les représentants du secteur bancaire – s’efforce de balayer une telle issue. Mais «le risque pourrait être que cela bloque au niveau pratique, si, par exemple, l’administration fiscale a du mal à suivre le rythme des requêtes d’entraides judiciaires des Etats-Unis», explique le professeur genevois. Ou «en cas de multiplication des procédures judiciaires en Suisse – par exemple de recours au civil d’employés bancaires», poursuit le juriste. Des blocages déjà rencontrés lors de la résolution du conflit UBS.