Le Fonds monétaire international (FMI) n’est résolument pas sur la même longueur d’ondes avec l’Union européenne (UE) sur la Grèce. Sa directrice Christine Lagarde a crevé l’abcès dimanche dernier, affirmant qu’elle n’était pas satisfaite de la mise en œuvre du troisième plan d’aide de 86 milliards d’euros négocié en août 2015. C’est par le biais d’une lettre adressée eu premier ministre Alexis Tsipras qu’elle a déclaré qu’il était prématuré d’envisager un programme de désendettement pour le pays. Une déclaration qui arrive au moment où le sujet est à l’ordre du jour au sein de l’UE. Celle-ci entend soulager Athènes qui consent des grands efforts pour accueillir les réfugiés.

Christine Lagarde a été contrainte de réagir face à la polémique après la publication samedi d’une conversation téléphonique tenue le 19 mars entre Poul Thomsen, chef du département Europe du Fonds, et Delia Velculescu, chef de mission du FMI pour la Grèce, révélée par Wikileaks. Les deux responsables y discutent de la stratégie à adopter dans les négociations qui achoppent sur la réforme des retraites ainsi que sur la réforme fiscale et vont jusqu’à évoquer un défaut de paiement.

Scénario catastrophe

Ce serait un terrible retour à la case départ. Le troisième plan d’aide avait été négocié justement pour éviter ce scénario catastrophe, ce qui aurait pu conduire au Grexit, c’est-à-dire la sortie de la Grèce de la zone euro. Grâce au déboursement d’une première tranche de 13 milliards d’euros en août 2015, Athènes avait remboursé ses créances à temps.

«La conversation entre les deux hauts cadres du FMI est arrivée comme un coup de poignard dans le dos de l’UE», commente un économiste européen. Tout embarrassé, Margaritis Schinas, le porte-parole de la Commission, a refusé de commenter les propos de Poul Thomsen et Delia Velculescu. «Pour notre part, nous travaillons en toute loyauté et en toute bonne foi pour réussir le plan d’aide», a-t-il déclaré lundi. Interrogé si l’UE et le FMI travaillaient encore ensemble, il a répondu par l’affirmative.

Suite à la révélation de Wikileaks, le premier ministre grec Alexis Tsipras s’est empressé de demander des explications au FMI. D’où la lettre de Christine Lagarde. «Ma vision des négociations en cours, c’est que nous sommes encore à une bonne distance d’un programme cohérent. Je conviens que des négociations fructueuses se construisent sur la confiance mutuelle, et l’incident de ce week-end m’a rendu inquiète sur notre capacité à faire des progrès dans un climat d’extrême sensibilité aux déclarations de l’une ou l’autre des parties.»

Le quartet (FMI, UE, Banque centrale européenne et Mécanisme européen de stabilité), chargé d’évaluer les réformes a repris ses travaux lundi à Athènes après une pause de deux semaines. L’enjeu est de taille: le déboursement d’une deuxième tranche d’aide. La Grèce en a besoin pour honorer des créances de 3,5 milliards d’euros au FMI et à la BCE, qui arrivent à échéance en juillet prochain. Un accord est aussi indispensable pour démarrer les discussions sur le désendettement promis à Athènes.