Comité de crise à Bercy avec les acteurs de l’agroalimentaire, mise sous surveillance immédiate de la filière de la viande et du poisson, renforcement des contrôles, descente de la brigade de répression des fraudes chez les sous-traitants de Findus. Les autorités françaises veulent aller vite et frapper fort pour déterminer les responsabilités dans le scandale de la viande de cheval vendue comme étant du bœuf dans des lasagnes congelées et d’autres plats cuisinés Findus.
L’affaire possède certes une forte dimension européenne: les premiers surgelés frelatés ont été découverts en Grande-Bretagne, l’abattoir est situé en Roumanie, les traders sont chypriotes et néerlandais. Mais c’est avant tout la réputation de l’industrie agroalimentaire de l’Hexagone, ainsi que celle des professionnels de la viande française qui sont en jeu.
Deux sociétés sous-traitantes de Findus et des autres marques vendant des plats cuisinés sous leur propre label (Auchan, Casino, Carrefour, Monoprix, Picard) sont en effet françaises. Comigel, dont le siège social est à Metz, prépare les plats surgelés sur commande. Spanghero, basée à Castelnaudary dans le Sud-Ouest, fabrique et commercialise les produits à base de viande. C’est chez ces deux fournisseurs que des agents de la direction de la répression des fraudes ont débarqué hier matin. Ils avaient déjà fait une première inspection vendredi chez Spanghero pour chercher des documents pouvant éclairer l’enquête en cours. Celle-ci devrait livrer de premiers résultats mercredi ou jeudi, a indiqué le président de la République en personne.
Mais en milieu de journée déjà, François Hollande a promis des mesures: «Il y a eu des manquements, visiblement des profits, des comportements inadmissibles, des sanctions devront être prononcées, administratives et pénales si le dossier le justifie.»
Difficile d’y voir clair pour l’heure: les acteurs se renvoient la balle de la responsabilité, chacun assurant avoir acheté des produits carnés estampillés «viande de bœuf». Pour l’heure, le président comme les ministres chargés de suivre le dossier au plus près tentent de circonscrire l’affaire: il s’agirait d’une fraude, d’une tromperie sur la marchandise, peut-être d’une négligence, non d’un scandale sanitaire mettant en danger la santé des consommateurs. Selon Benoît Hamon, le ministre de la Consommation, «cette opération relève avant tout d’une logique financière qui aurait rapporté plus de 300 000 euros». Bruxelles partage cette analyse, mais la Grande-Bretagne va néanmoins multiplier les tests pour le vérifier.
En milieu d’après-midi, une réunion de crise s’est tenue à Bercy. Les trois ministres de l’Agriculture, de l’Agroalimentaire et de la Consommation ont réuni les professionnels de l’abattage, de la commercialisation de la viande, de la transformation et de la distribution pour discuter de la traçabilité des viandes, de leur étiquetage et du renforcement de la surveillance. «Il va falloir améliorer le maillage de nos contrôles», a expliqué Jean-René Buisson, le président de l’Association nationale des industries de l’agroalimentaire, avant la séance. «Il faudra ensuite demander aux agents de la répression des fraudes de multiplier les contrôles dans le secteur de la viande. Pour le moment, ils se concentrent surtout sur les produits laitiers et les fromages au lait cru notamment, pour des questions sanitaires.» Au terme de la rencontre, Benoît Hamon a confirmé un «renforcement immédiat» de la surveillance, tandis que son collègue chargé de l’Agriculture, Stéphane Le Foll, a annoncé qu’une réunion se tiendra à Bruxelles «avant la fin de la semaine».
Dans la foulée, les associations de consommateurs ont été reçues par Benoît Hamon. Elles demandent notamment un meilleur étiquetage portant l’indication de l’origine de la viande sur les plats cuisinés et autres produits à base animale. Les professionnels de la viande et du bétail ont la même revendication. Ce sera aussi la position que la France défendra lors de la réunion européenne.
«Cette opération relève avant tout d’une logique financière qui aurait rapporté plus de 300 000 euros»