C’est officiel depuis dimanche. Après plusieurs semaines d’attentes, de suppositions et de rumeurs, Gareth Bale est la nouvelle pépite du Real Madrid. C’est dans les dernières heures du mercato d’été qu’a été annoncé ce qui devait être le transfert le plus cher de l’histoire. Un montant de 100 millions d’euros a un temps été évoqué. Le puissant ailier gallois, élu deux fois meilleur joueur de la Premier League anglaise – il évoluait à Tottenham depuis 2007 –, n’aura finalement coûté «que» 91 millions d’euros, selon la presse espagnole spécialisée. Le joueur le plus cher reste donc Cristiano Ronaldo, acheté 94 millions d’euros par le même club madrilène, en 2009.

S’il ne juge «pas plaisant du tout» le fait que le footballeur soit «devenu un produit qu’il faut vendre», Michel Platini, président de l’UEFA et pourfendeur des exagérations financières du football européen, ne se montre pourtant pas choqué par la dépense de Madrid, un club, il est vrai, coutumier du fait (voir tableau). «Si le Real avait acheté trois joueurs à 30 millions, personne n’aurait rien dit, suppose-t-il dans L’Equipe. Cela ne me pose pas de problème, si le club acheteur a les moyens.»

Incontestablement, le Real en a, des moyens. Il est le club de football le plus riche du monde, avec ses 512 millions d’euros de revenus en 2011/2012. Six fois plus qu’en 1996/1997. Sa dernière grande folie en date – le rachat de Cristiano Ronaldo à Manchester United – aurait été rentabilisée en quelques mois seulement. En avril 2010, l’on apprenait en tout cas que 1,2 million de maillots à l’effigie du Portugais avaient été écoulés par le club. Soit une recette de 112,8 millions d’euros.

C’est précisément cette stature de multinationale qui permet au club de financer son nouvel investissement. Selon Raffaele Poli, responsable et co-fondateur de l’Observatoire du football du Centre international d’études du sport (CIES), à Neuchâtel, le Real est une des rares entreprises en Espagne qui, en cette période d’incertitudes économiques, bénéficient de la confiance de pourvoyeurs de crédits. «Les banques sont contentes de prêter de l’argent à un club avec un tel chiffre d’affaires», commente le spécialiste.

Côté vendeur, Tottenham a bien joué le coup, concède-t-il aussi. Non seulement le club londonien avait d’emblée exigé un sacrifice financier inédit pour laisser partir son joueur clé, mais en plus il n’a pas négocié dans l’urgence ou par nécessité d’encaisser le produit d’une vente. Ses finances sont saines. En 2011/2012, ses revenus s’élevaient à 178 millions d’euros.

Si toutes ces circonstances favorables n’ont pas fait de Gareth Bale le joueur le plus coûteux de l’histoire, elles en ont au moins fait le plus surcoté. Selon les calculs du CIES, sa valeur «réelle» n’est située qu’entre 43 et 50 millions. Il serait donc surévalué, au bas mot, de 41 millions d’euros. Soit une surcote de 82%!

En comparaison, l’autre gros transfert de l’été, le passage de Gonzalo Higuain de Madrid à Naples, apparaît comme une bonne affaire. Et ce, même si le club italien a déboursé 37 millions d’euros pour débaucher l’attaquant argentin. Soit «seulement» 7,5 millions de plus que sa valeur théorique (+25%).

«Si Tottenham avait réalisé de meilleurs résultats à l’échelle nationale et internationale, et si le pays de Galles était une nation plus performante, notre estimation de prix aurait sans doute été plus élevée», explique Raffaele Poli pour justifier une partie de cette différence. Un écart qui, lui, exaspère Michel Platini. «Est-ce que Bale vaut 100 millions d’euros? C’est un autre débat […]. C’est pour cela que l’on essaie de mettre des règles.»

Le Real est une des rares entreprises en Espagne qui, en cette période d’incertitudes, bénéficient de la confiance des banques