Malgré sa blancheur et les patins à lame traditionnelle qu’il faut chausser pour y glisser, la patinoire de Boudry (NE) est inhabituelle. Des plaques de polymère encastrées les unes aux autres remplacent la couche de glace. Des écoliers, ce jeudi après-midi de janvier, ne semblent pas voir la différence. Ils jouent et se pourchassent, avec leur casque sur la tête et leurs lames aux pieds. Leur enseignante semble un peu moins enthousiaste: «N’essayez pas de faire des pirouettes», avertit-elle.

A défaut de tenter des saltos ou autres arabesques, quelques traversées hésitantes ont permis de tester ce revêtement proposé par la société lucernoise Glice. Les premiers instants sont plutôt perturbants. Les patins adhèrent trop. «Faites deux à trois tours pour chauffer la lame», conseille un homme chargé de l’entretien. Après quelques minutes d’effort, la sensation de glisse s’améliore effectivement. On se croirait sur une patinoire traditionnelle. La musique d’ambiance de la radio locale aide à créer l’illusion.

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Huit cents installations

Fondée il y a six ans par Viktor Meier et Toni Vera, la société Glice a connu ses premiers succès avec des installations au Moyen-Orient et en Amérique du Sud. Sa plus grande patinoire, de 2200 mètres carrés, se trouve à Bakou en Azerbaïdjan.

La glace synthétique existe depuis trente ans et quelques sociétés concurrentes proposent aussi des revêtements en polyéthylène. Mais Toni Vera, ancien hockeyeur professionnel et expert en ingénierie des matériaux, voulait améliorer cette surface. «Aujourd’hui, Glice compte 800 installations dans 80 pays», dit Philipp Ruckli, engagé par les deux fondateurs de l’entreprise pour développer le marché suisse romand. «Des hockeyeurs s’entraînent sur nos patinoires, à l’exemple de Roman Josi, joueur dans la National Hockey League aux Etats-Unis.»

Des patinoires moins gourmandes en énergie

Après Balexert à Genève et Boudry dans le canton de Neuchâtel et une piste de curling à Aigle, d’autres projets sont prévus en 2019. 

Le groupe Manor prévoit aussi d’installer des patinoires synthétiques dans ses centres commerciaux, à Sierre, Monthey, Vevey et Chavannes. Des hôtels tentent également l’expérience, comme le Grand Hôtel Kempinski à Genève ou The Chedi à Andermatt. «Nos clients apprécient ces patinoires car elles n’entraînent pas de nuisances sonores liées aux générateurs. De plus, elles sont écologiques. Elles fonctionnent sans eau ni électricité. Une patinoire en glace est très gourmande en énergie. Le mètre carré correspond à la consommation quotidienne d’un ménage moyen», affirme Philipp Ruckli, installé dans le cabanon qui jouxte la patinoire. Le coût de l’installation des 400 mètres de Boudry s’est élevé, pour sa part, à 150 000 francs.

Les fondateurs de Glice ont lancé leur entreprise avec leurs fonds propres. Aujourd’hui, cette société de 22 personnes réalise un chiffre d’affaires de 5 millions de francs. A l’étranger, elle a choisi de travailler avec un système de franchises. «L’entreprise est rentable, note Philipp Ruckli. Avec le réchauffement climatique et la prise de conscience écologique, nous espérons poursuivre sur notre lancée.»