«Le taux de mortalité des entreprises n'a peut-être jamais été aussi élevé et on parle aux Etats-Unis d'une durée de vie moyenne qui ne serait que de trois ans. Ce ne sont plus des firmes mais des fusées», s'amuse Pina Amarelli, qui dit rechercher avec ses collègues le meilleur moyen d'assurer la pérennité des sociétés familiales. L'association travaille avec des spécialistes académiques des entreprises familiales pour tenter de définir «la formule magique» qui fait qu'une entreprise puisse se transmettre entre générations sans trop de dommages. «C'est un véritable défi, souligne Jean Hugel, qui n'avait pas de fils et dont les deux filles n'ont pas été intéressées par la reprise de l'activité. Dans mon cas, soit votre fille se marie avec quelqu'un qui n'est pas du métier et vous perdez en quelque sorte l'investissement d'une dizaine de générations. Soit elle s'unit avec un concurrent et là c'est encore pire», s'amuse l'entrepreneur, qui a finalement trouvé la solution du côté de ses neveux.
Selon le patriarche de ce fleuron du vignoble français, «les multinationales ont à apprendre des structures comme les nôtres». Et ce dernier de raconter son anecdote préférée. «Les gens de Cadburry Schweppes m'ont dit un jour que j'avais un excellent consultant en packaging. Tout ça parce que l'étiquette de mes bouteilles a une inscription en rouge sur fond jaune.» Le père de Jean Hugel, qui avait travaillé pour Maggi à Berlin, s'était servi d'une étude de marché de ce dernier réalisée en 1895, et qui mettait en avant l'avantage chromatique que représentait une telle combinaison de couleurs. «Quand je suis dans un magasin où des centaines de bouteilles sont exposées, je reconnais la mienne au premier coup d'œil.»
Fiscalité contraignante
Que ce soit sur le plan des relations familiales ou des aspects patrimoniaux, la préoccupation majeure des Hénokiens tourne principalement autour de la succession. Pour Pina Amarelli, onzième génération de la famille à la tête de l'entreprise, «la plupart des pays ont des règles fiscales qui rendent difficile la transmission d'un bien industriel». Cette dernière défend l'idée des conseils de famille, qui permettent à ses membres de se réunir en dehors des conseils d'administration pour parler d'aspects patrimoniaux plus larges que les comptes de l'entreprise. Les Hénokiens avaient d'ailleurs demandé à Pictet & Cie de leur organiser une présentation de leur concept de «familly office» lors de leur assemblée générale à Genève. Le banquier privé, qui aura 200 ans dans cinq ans, n'a pas indiqué s'il fêterait son bicentenaire en rejoignant les rangs des Hénokiens.