Audemars Piguet a dépassé la barre des 800 millions de chiffre d’affaires
Horlogerie
La marque indépendante navigue à contre-courant. Les détaillants augmentent les commandes et la croissance est encore à deux chiffres dans la Vallée de Joux

Sur la forme comme sur le fond, le discours tranche avec celui de la plupart des autres horlogers présents cette semaine au Salon international de la Haute horlogerie (SIHH). La chute des marchés financiers, celle du prix du pétrole, le ralentissement chinois, le désamour pour Hongkong… Audemars Piguet résiste à tous ces vents contraires, à en croire son patron, François Bennahmias.
Les exportations de montres suisses haut de gamme ont beau avoir reculé de quelques pourcents, l’an dernier, «elles ne nous représentent pas, balaye cet homme de poigne. En 2014, nous avions dépassé les 700 millions de francs de chiffre d’affaires. En 2015, nous avons fait plus que 800 millions». Un millésime que l’emblématique patron de la marque en mains familiales qualifie «d’excellent».
Cette immunité, Audemars Piguet la doit notamment à la ventilation de ses ventes – seulement un tiers de ses revenus sont réalisés en Asie, un cinquième en Amérique du Nord et du Sud. Mais la marque tire également profit du «grand nettoyage» dans lequel elle s’est lancée, poursuit le patron de la griffe indépendante sise au Brassus, dans la Vallée de Joux.
«Nous avons réduit le nombre de références ainsi que les délais de livraison des best-sellers, harmonisé le message de la marque et nous nous sommes fixé des objectifs et des délais très clairs». Dans ces transformations, «nous avons associé les détaillants. Nous leur parlons honnêtement, y compris lorsque nous commettons des erreurs», souligne François Bennahmias.
Commandes doublées au Moyen-Orient
Aujourd’hui, poursuit l’homme fort d’Audemars Piguet, ces revendeurs savent qu’ils gagneront de l’argent en distribuant des Royal Oak ou d’autres produits de la marque. Un cercle vertueux s’est donc installé, tandis que d’autres horlogers peinent à convaincre les détaillants de leur prendre quelques nouveautés, tant les stocks sont aujourd’hui élevés. Au SIHH, les clients du Moyent-Orient ont doublé leurs commandes par rapport à l’an dernier, illustre encore François Bennahmias. Et la chute du prix de l’or noir n’y a rien changé.
L’année 2016? Dans son bureau temporaire de Palexpo, le patron décide soudain d’inverser les rôles, en mettant au défi les deux journalistes qui lui font face: «Comment vous feriez, vous, pour faire progresser le chiffre d’affaires sans augmenter le nombre de montres produites?» La question n’est pas que rhétorique: le capitaine d’industrie attend patiemment la bonne réponse.
«Nous n’allons pas augmenter nos prix (le prix public médian est à 35 000 francs, ndlr)», réfute-t-il. Et la production, d’environ 40 000 pièces par an, restera stable. En revanche, le chiffre d’affaires progressera grâce à un changement du «mix produits». Concrètement, la marque va augmenter les quantités de montres plus chères tout en réduisant celles de modèles plus abordables. L’autre enjeu, complète François Bennahmias, c’est l’intégration progressive de la distribution, et donc la récupération d’une partie de la marge qui, sinon, irait aux détaillants.
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