Richemont entérine ses changements de gouvernance. L’assemblée générale du groupe de luxe genevois, qui s’est tenue mercredi à huis clos en raison du covid, a sans grande surprise validé l’ensemble des propositions qui lui étaient soumises.

Les actionnaires étaient notamment appelés à élire deux nouveaux membres non exécutifs au conseil d’administration: Jasmine Whitbread et Patrick Thomas. La première est une spécialiste des ESG (environnement, social, gouvernance), qui – parmi ses nombreux mandats – conseillait déjà le comité de Richemont dédié à ces questions. Le second a dirigé le groupe français Hermès entre 2003 et 2014 et préside notamment les conseils d’administration du producteur de champagne Laurent-Perrier et de la société d’investissement privée Ardian.

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Cette assemblée marque également le départ de quatre administrateurs: Cyrille Vigneron et Nicolas Bos, qui restent patrons, respectivement, des marques joaillières Cartier et Van Cleef & Arpels, ainsi qu’Alan Quasha et Gary Sage. Ces derniers siégeaient depuis 1988 et 2010 au conseil, qui compte désormais 18 personnes.

Le comité exécutif supérieur chargé de la direction stratégique du groupe a lui aussi été remanié en profondeur, passant de huit à trois membres. Seuls restent Johann Rupert, président et actionnaire majoritaire de Richemont, Jérôme Lambert, patron du groupe, et Burkhart Grund, directeur financier. Philippe Fortunato, directeur général de l’activité mode et accessoires, Emmanuel Perrin, directeur de la division horlogère du groupe, et Frank Vivier, directeur de la transformation, se retirent de cet organe. De même que Cyrille Vigneron et Nicolas Bos.

Dans son message aux actionnaires, transmis par écrit, Johann Rupert indique que ces changements visent à «répondre le plus efficacement possible aux exigences changeantes de notre environnement opérationnel, conformément aux meilleures pratiques».

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«Il reste du travail à accomplir»

Roger Said, codirecteur de la fondation Actares pour une économie plus responsable, salue ce remaniement tout en restant critique: «L’indépendance du conseil d’administration n’est toujours pas suffisante. Six membres du conseil sont proches de l’actionnaire principal, un membre reçoit une rémunération importante pour des services de consultant, et il reste toujours deux membres qui exercent une fonction exécutive dans l’entreprise [Jérôme Lambert et Burkhart Grund, ndlr].»

Un avis partagé par le directeur de la fondation pour l’investissement responsable et l’actionnariat actif Ethos, Vincent Kaufmann: «Nous avons souvent été critiques par rapport au manque d’indépendance des membres du conseil d’administration de Richemont et à la sous-représentation des actionnaires minoritaires. La situation s’améliore, mais il reste encore du travail à accomplir.»

En ce qui concerne le comité exécutif, Vincent Kaufmann ne s’étend pas sur sa recomposition du point de vue stratégique. Il constate cependant que la réduction drastique du nombre de ses membres aura pour effet de réduire la transparence de Richemont en matière de rémunérations, étant donné que les montants accordés aux dirigeants qui quittent ce comité ne seront plus publiés.

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Rémunérations observées

Selon Ethos, la rémunération fixe de Jérôme Lambert (1,6 million pour l’exercice décalé achevé au 31 mars 2021) est de 22% supérieure à la médiane observée dans des entreprises de taille comparables en termes de capitalisation, de nombre d’employés et de chiffres d’affaires, tous secteurs confondus. «Mais dans le management du groupe, cet écart monte à 80%», précise Vincent Kaufmann.

Chez Actares, Roger Said concède que Richemont a réduit la rémunération de son conseil d’administration, au cours de l’année écoulée, de 28,1% à 5,7 millions de francs. Il relève cependant que «même en tenant compte de ces réductions liées au covid, les rémunérations du groupe dépassent les seuils définis par nos critères de vote».

Malgré cette baisse temporaire, la rémunération globale du conseil d’administration de Richemont devrait rapidement retrouver, voire dépasser, ses niveaux d’avant-crise. L’assemblée générale a approuvé mercredi un montant global maximal de 8,1 millions de francs pour l’année à venir, alors qu’elle avait atteint 7,9 millions en 2019.