Et maintenant, cap sur la santé et le bien-être! Lors de la présentation de ses dernières nouveautés, le mercredi 18 mai, à Milan, Huawei, qui y avait invité les médias, a présenté ces thèmes comme les nouveaux piliers de son développement pour les années à venir. Même s’il avait déjà proposé des produits dans ce domaine, le conglomérat de Shenzhen a massivement renouvelé son offre de bracelets et montres connectés.

Céramique, titane, verre en saphir… le modèle le plus prestigieux, la GT 3 Pro, dont le prix culmine à 699 euros (de 369 à 599 francs environ en Suisse), est censé rivaliser avec ses matériaux nobles et ses services (sur abonnement: coaching sportif, conseil de nutrition…) avec l’Apple Watch, le leader du marché.

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A Milan, la marque chinoise a également présenté son nouveau modèle de téléphone pliable, le Mate Xs 2 (1999 euros). Mais il n’a pas vraiment attiré l’attention. C’est que, depuis les sanctions imposées sous l’ère Donald Trump par l’administration américaine, les ventes des téléphones Huawei se sont effondrées. En cause: l’impossibilité pour ses appareils d’utiliser la suite applicative de Google (Google Store, Gmail, Google Maps, etc.), un obstacle majeur pour les consommateurs.

L’éphémère premier fabricant mondial (au deuxième trimestre 2020, selon l’institut Counterpoint) n’apparaît plus désormais dans les classements des principaux acteurs, relégué en queue de peloton par les champions historiques Apple, Samsung, mais aussi ses rivaux nationaux Xiaomi et Oppo. Les perspectives ne sont guère meilleures sur l’activité historique du conglomérat – les infrastructures télécoms –, également frappées par les sanctions américaines.

Chiffre d’affaires en recul

Les derniers résultats annuels, dévoilés par Huawei fin mars, illustrent cette situation critique. Le chiffre d’affaires a reculé de 28,5% entre les exercices 2020 et 2021, à 99,9 milliards de dollars (95 milliards d’euros) – proche de son niveau de 2017 – et ce, dans toutes les régions du monde, y compris la Chine. Un point positif, cependant, son bénéfice net était en franche progression en 2021, à 17,8 milliards de dollars.

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Dans ce contexte, il est logique que Huawei cherche d’autres relais de croissance, à commencer par le marché des montres connectées. Pour Stéphane Curtelin, directeur marketing de la marque en France, «c’est un marché ouvert et dynamique», où à peine entre 10 et 20% des consommateurs sont équipés, et toujours en forte croissance (+24% en 2021, selon Counterpoint, qui place déjà Huawei sur la troisième marche du podium). Le groupe veut multiplier les services: Health Plus, à 7,99 euros par mois, mais aussi Huawei Music ou Video. Ces services payants sont l’une des clés des bons résultats de son concurrent Apple (18% des revenus).

«Des moyens et une capacité de résilience incroyables»

Mais la mue de Huawei ne s’arrête pas là. Au Mobile World Congress de Barcelone, fin février, l’entreprise a affiché ses ambitions dans le monde professionnel avec des PC, des tablettes, des écrans. Plus récemment, il s’est lancé dans le secteur de l’énergie (éolien, solaire) et celui de l’automobile, malgré la féroce concurrence sur l’ensemble de ces marchés. Reste qu’à multiplier les secteurs la stratégie de Huawei apparaît moins lisible.

Sa puissance de frappe dans la recherche et développement reste cependant toujours impressionnante. Le groupe y a consacré 17,5 milliards de dollars en 2021, soit 22% de son chiffre d’affaires, au plus haut niveau depuis une décennie. «Ils ont des moyens et une capacité de résilience incroyables», admet Thomas Husson, analyste au cabinet Forrester. Celui-ci souligne cependant le problème qu’a la marque à maintenir son image d’entreprise innovante de qualité auprès du grand public, d’autant que ses dépenses marketing se sont effondrées. Huawei dit miser sur des visions de long terme, mais en a-t-elle le temps?

Note: article mis à jour sur les prix en Suisse le 25 mai