Au fil du week-end, les cadres du gouvernement de Shinzo Abe ont pu célébrer une première victoire dans le long combat contre la chute des prix qu’ils ont entamé en janvier dernier. «Nous sommes en route vers une sortie de la déflation», a commenté Akira Amari, le ministre de l’Economie. Cette satisfaction fait suite à la publication, vendredi, de données gouvernementales montrant que la hausse des prix dépasse le seul effet des taux de change.
Depuis plusieurs mois déjà, l’indice général des prix à la consommation est en hausse dans l’Archipel. Mais cette poussée n’avait pas grande signification pour les économistes. Elle n’était, en effet, alimentée que par la seule dépréciation du yen, qui renchérit automatiquement le prix des matières premières ou des fruits et légumes importés. Si l’on retirait du calcul de l’indice ces statistiques sur l’énergie et les produits alimentaires, les étiquettes étaient encore en stagnation dans le pays. En octobre, elles ont enfin frémi. L’indice global a ainsi progressé, le mois dernier, de 0,9% en glissement annuel mais, surtout, son sous-jacent calculé sans les importations de pétrole, de gaz ou de chou chinois a enregistré un progrès de 0,3%, ce qui représente la hausse la plus rapide jamais enregistrée depuis… quinze ans.
Augmentation des tarifs
Pour l’exécutif, cette donnée prouverait que des entreprises s’autorisent enfin une petite augmentation de leurs tarifs. La confiance serait de retour, estime Tokyo, et avec elle un cercle vertueux. Les groupes voudraient croire à la sortie de la déflation et à la reprise de la croissance. Ils devraient donc investir plus et accepter de signer des CDI plutôt que de recourir au travail temporaire. Rassérénés, les salariés devraient, eux, consommer sans modération. Et le pays sortirait enfin de sa spirale déflationniste.
A Tokyo, les analystes refusent pourtant de s’associer aux cris de victoire. Chez Goldman Sachs, Naohiko Baba note que la hausse des prix d’octobre a été très largement alimentée par une poignée de facteurs exceptionnels. Il pointe notamment la hausse des primes d’assurance sur les accidents décidée par les opérateurs. Elles ont bondi de 10,1% en glissement annuel et cette envolée représente, à elle seule, près de la moitié de la hausse du sous-jacent de l’indice des prix.
Hausse de la TVA en 2014
Dans le secteur de la grande consommation, les hausses enregistrées en octobre sont toujours très maigres. «Et que va-t-il se passer au début de l’année fiscale 2014?» s’interroge Ryutaro Kono, l’économiste en chef de BNP Paribas au Japon. Au 1er avril prochain, une hausse de la TVA va entrer en vigueur et probablement casser le dynamisme de la consommation. La valeur du yen s’étant stabilisée, l’effet «taux de change» va aussi disparaître au premier semestre de l’année prochaine. La progression de la hausse des prix risque alors de se trouver de nouveau enrayée. L’indice pourrait rester inférieur à 1% fin 2014.