On le sait, les diamants sont réputés être éternels. Et la chanson «Diamonds are girls best friends», interprétée par la sculpturale Marilyn Monroe dans le film Les hommes préfèrent les blondes , pourra encore longtemps faire office de slogan publicitaire percutant. C’est que la demande pour ces précieuses gemmes va exploser d’ici à 2020. Selon un rapport du cabinet de conseil Bain & Company, effectué en collaboration avec l’Antwerp World Diamond Centre (AWDC) et publié cette année, ce marché atteindra 26,1 milliards de dollars (24,3 milliards de francs) dans sept ans, contre 15,6 milliards en 2011. Il s’agit d’un taux de croissance de 6% par an, d’après le Global Diamond Industry Report. «De forts signaux laissent entrevoir un avenir prometteur pour le marché du diamant», affirme Yury Spektorov, associé de Bain & Company et coauteur de l’étude.

Si l’avenir des diamants semble étincelant, celui du marché mondial de la joaillerie, estimé entre 150 et 200 milliards de dollars, l’est aussi, selon les spécialistes. Et ses taux de croissance pourraient également se calquer sur ceux des diamants. C’est peut-être ces perspectives qui ont convaincu Swatch Group de s’emparer de la marque américaine Harry Winston en début d’année. Pour Nick Hayek, patron du groupe, «d’ici à trois, quatre ou cinq ans, les ventes d’Harry Winston devraient atteindre le milliard de francs». Elles pourraient ainsi quadrupler.

Ce processus de consolidation de la branche semble même s’accélérer ces derniers mois. Kering (ex-PPR) a ainsi finalisé début juillet le rachat du groupe italien Pomellato. Ce qui démontre que le marché est en pleine mutation, tandis que, pour l’heure, il se caractérise encore par une forte atomisation. En d’autres termes, il ne compte que peu de grandes griffes pour un florilège de petites marques. Les maisons célèbres, comme Cartier ou Tiffany, ne s’arrogent en effet que 20% de ce segment. Mais leur poids face aux quelque 10 000 acteurs indépendants régionaux, qui fabriquent pour l’essentiel des bijoux non griffés, ne peut qu’augmenter à terme, selon les spécialistes. Ne serait-ce que sous l’effet de l’appétit grandissant des nations émergentes, et de leur évolution démographique. Ou via une expansion encore en devenir sur le marché clé de la Chine.

Preuve de la mue en cours, la part des marques établies a tout simplement doublé en dix ans. «Les quelques acteurs prédominants le resteront à l’avenir. Ils bénéficient de leur taille pour prospérer. A condition de continuer à faire rêver et de rester désirable», explique Serge Carreira, professeur à Sciences Po à Paris, et spécialiste du luxe.

Alors que la branche a vécu ces quinze dernières années l’arrivée des nouveaux acteurs, tels Dior ou Louis Vuitton, qui sont venus sur un territoire jusqu’alors réservé aux acteurs historiques, Richemont pourrait faire partie des gagnants, a estimé la banque Barclays la semaine dernière dans une étude. Le groupe genevois de luxe, avec ses trois marques, Cartier, Van Cleef & Arpels et Piaget, pourrait croître de manière organique de 15% ces prochaines années dans la joaillerie, contre 7% pour son pôle horloger. Les courbes de croissance de ces deux segments ont d’ailleurs commencé à diverger cette année, avec une hausse de respectivement 16% et 8%, constate la banque. Jusqu’à présent, elles connaissaient une évolution plus ou moins similaire. L’enjeu est de taille car la haute joaillerie, au niveau mondial, pèse bien davantage que celui des montres. Soit 55 milliards d’euros contre 34 milliards au prix public.

Malgré les soubresauts actuels en Chine, De Beers reste très positif sur le moyen et long terme pour ce pays. Le groupe s’attend à ce que la part de l’Empire du Milieu dans l’achat de produits dotés de diamants passe de 13% à 17% d’ici à 2017. «La demande de la classe moyenne en produits reconnus continue de croître», souligne Serge Carreira. Le groupe chinois Hengdeli voit même plus haut. Le distributeur de produits horlogers pense qu’à terme la joaillerie sera dix fois plus importante que l’horlogerie dans la deuxième économie mondiale. Pour l’heure, a calculé Altagamma Bain, les bijoux ne pèsent que 25% du marché des montres. D’ailleurs, ce mouvement semble avoir déjà commencé. La semaine dernière le joaillier américain Tiffany a publié des performances supérieures aux attentes. Elles ont surtout été tirées par la région Asie-Pacifique, particulièrement en Chine, où les ventes de Tiffany se sont envolées de 20% au deuxième trimestre, et de 17% sur les six premiers mois de l’année.

Le marché est en pleine mutation, tandis que – pour l’heure – il se caractérise par une forte atomisation