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Le joker latino de l’Espagne secoué par une deuxième nationalisation

Le groupe pétrolier espagnol Repsol a vu sa filiale argentine YPF nationalisée par Buenos Aires il y a quinze jours. C’est à présent au tour de Red Electrica de se voir exproprié en Bolivie. Le contexte économique et politique entourant ces deux revers est cependant très différent

C’est la deuxième nationalisation à laquelle l’Espagne est confrontée en moins d’un mois en Amérique latine, région de prédilection de ses grands groupes. Mardi, le gouvernement bolivien a nationalisé le réseau électrique de Red Electrica. La décision fait écho à l’expropriation par Buenos Aires de la compagnie pétrolière YPF, le 16 avril, jusque-là contrôlée par le groupe ibérique Repsol.

Ces revers n’arrangent pas les affaires de la bourse de Madrid qui, en baisse de 20% cette année, a touché mercredi son plus bas niveau depuis trois ans. Dans une économie espagnole frappée de plein fouet par la crise, le dynamisme de ses multinationales en Amérique latine semblait pouvoir leur permettre de traverser ces années noires. «Bien sûr, le premier réflexe est de se dire que l’Espagne est le premier investisseur étranger – en montant absolu – en Amérique du Sud et centrale», reconnaît Pablo Garcia Gomez, responsable de la maison de courtage Carax-Alphavalue. «Le bruit autour de ces annonces fait oublier combien les groupes espagnols ont limité leurs implantations dans les pays réputés les plus instables – Venezuela, Argentine et Bolivie en tête – ces dernières années», rappelle cependant le partenaire d’Alphavalue, bureau de recherche parisien sur les marchés européens.

Présence réduite dans les pays «instables»

Dans le domaine bancaire, Santander – qui avait vu ses activités nationalisées par Hugo Chavez – et sa concurrente BBVA ont ainsi mis l’accent sur le Brésil et le Mexique. Telefonica a de son côté gardé le souvenir cuisant de la dévaluation de 50% qui avait laminé ses activités vénézuéliennes en 2010.

Les décisions prises par la Bolivie et l’Argentine sont également différentes. Red Electrica ne réalisait pas plus de 2% de ses ventes dans le pays andin et le gouvernement a promis de dédommager l’électricien des investissements réalisés sur son réseau. Le président Evo Morales a par ailleurs précisé hier que les investissements du groupe pétrolier Repsol seraient «toujours respectés». A l’inverse, l’administration de Cristina Kirchner en Argentine n’a pas précisé si elle dédommagerait Repsol pour la saisie d’une participation estimée à 10,5 milliards de dollars.

Une décision politique?

Selon Pablo Garcia Gomez, ces décisions sont à remettre dans un contexte politique particulier. «Madrid a vu revenir au pouvoir [ndlr: en décembre] des conservateurs moins enclins à soutenir ces pays, contrairement au précédent gouvernement socialiste qui avait accepté de refinancer des Etats bannis des marchés financiers internationaux comme l’Argentine ou la Bolivie», estime l’analyste espagnol.