Pourtant, les banques d'investissement ont elles aussi péché en tardant à réagir. Ce retard s'expliquerait en partie par les conflits d'intérêts qui existent avec les autres activités de la banque, qui peuvent pâtir de mauvaises perspectives. «Les analystes n'ont pas de véritable motivation à fonctionner en tant que système d'avertissement anticipé», relevait à ce sujet la NZZ de lundi. Au Crédit Suisse First Boston (CSFB), on estime que «les banques d'investissement ont déjà réagi en se rapprochant du marché, ce qui n'a pas encore été le cas des grandes agences de notation financière», ainsi que le souligne Nanette Hechler, responsable de la recherche obligataire sur le marché suisse. Et de rappeler les circonstances qui ont incité le CSFB à prendre des mesures dans ce sens l'an dernier, après la forte augmentation de la volatilité et des spreads observée en quelques semaines. Ce qui a aiguisé la sensibilité des marchés aux risques de crédit.
Mais a-t-on tiré quelque enseignement en Suisse de la banqueroute de Swissair (dont les obligations se traitent actuellement à 7% de leur valeur nominale)? A la ZKB (Banque Cantonale de Zurich), Luca Corletto, responsable de la recherche obligataire, ne voit pas la nécessité de modifier l'approche de la banque, laquelle occupe en Suisse le deuxième rang dans les émissions d'emprunts domestiques, derrière justement le CS First Boston mais devant UBS Warburg. «Nous avons de toute façon pour habitude de réagir plus rapidement que les grandes agences mondiales», commente le spécialiste zurichois. Pour ce dernier, «la publication des bénéfices ne devrait pas exercer d'impact majeur sur la note de solvabilité d'un débiteur». Quant aux emprunts Swissair, «nous avons recommandé de les vendre en avril 2001. Ceux qui voulaient les conserver le faisaient à leurs risques et périls et en connaissance de cause». Parmi les principaux émois ressentis récemment sur le marché obligataire helvétique, il convient de signaler ceux occasionnés par les emprunts de Ascom ou de Von Roll, lesquels se traitent actuellement à, respectivement, la moitié et un peu plus d'un tiers de leurs valeurs nominales.