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La Jordanie, engagée auprès du Fonds monétaire international (FMI) à mener des réformes structurelles en échange d’un prêt de plusieurs centaines de millions d’euros, vient d’être secouée pendant une semaine par d’importantes manifestations contre des hausses de prix à répétition et un projet de loi fiscale.
Le mouvement de protestation populaire a conduit à la démission du Premier ministre. Pour calmer la rue, son successeur, qui doit encore former un gouvernement, a décidé de retirer le projet de loi controversé. L’économie jordanienne traverse une période difficile – la Banque mondiale évoque une «faible perspective de croissance en 2018» –, 18,5% de la population est au chômage, et 20% vit à la limite du seuil de pauvreté.
Le poids des réfugiés
L’accueil de centaines de milliers de Syriens ayant fui la guerre pèse aussi lourdement sur les finances publiques et Amman appelle régulièrement la communauté internationale à une aide plus substantielle sur ce dossier.
La cheffe de la diplomatie européenne Federica Mogherini a annoncé dimanche une nouvelle aide de 20 millions d’euros à la Jordanie, «destinée à soutenir des projets en faveur des tranches les plus vulnérables de la société». Présente dimanche à Amman, Federica Mogherini a assuré que l’Union européenne (UE) «veut soutenir la Jordanie par tous les moyens possibles, notamment économiques et financiers».
"The message the EU is bringing to Jordan is one of strong partnership and of full support to all Jordanians" @FedericaMog joint press conference with @AymanHsafadi https://t.co/0rEM6QWjXh pic.twitter.com/9hcfPpLsgH
— European External Action Service - EEAS 🇪🇺 (@eu_eeas) 10 juin 2018
L’UE soutient la Jordanie dans différents secteurs d’activité – notamment hydraulique, énergétique et humanitaire –, pour un montant total d’un milliard d’euros depuis 2016, a précisé Federica Mogherini, insistant sur le rôle «vital» de la Jordanie dans la région. Liée à l’UE par un accord d’association depuis 2002, la Jordanie – pays frontalier de la Syrie, d’Israël, des Territoires palestiniens et d’Irak notamment –, bénéficie depuis fin 2010 d’un «statut avancé», ce qui ouvre la voie en particulier à des avantages commerciaux supplémentaires.
Une classe moyenne excédée
Après une semaine de manifestations, les autorités jordaniennes ont dû reculer sur un projet de loi fiscale décrié. Selon les analystes, les Jordaniens, toute classe sociale confondue, sont épuisés par des hausses de prix à répétition.
Depuis janvier, le prix du pain a augmenté de 100%, le carburant a été majoré à cinq reprises et les factures d’électricité ont augmenté de 55% depuis février. Médecins, avocats ou entrepreneurs, en Jordanie, c’est aussi une classe moyenne excédée qui a été au cœur des récentes manifestations contre la vie chère.
Durant une semaine, ils ont été plusieurs milliers à battre le pavé une fois la nuit tombée, réclamant en priorité le retrait du projet de loi sur l’impôt sur le revenu. «Dans d’autres pays, des mouvements de contestation comme celui-ci peuvent sembler banals, mais en Jordanie s’opposer publiquement au pouvoir relève de l’acte de bravoure», affirme Rahmé Jaafar, qui n’a pas raté une seule manifestation.