La mort de Milton Friedman a été annoncée jeudi matin au cours d'une conférence du Cato Institute, le plus libertarien des groupes de réflexion américains. Les partisans du moins d'Etat et de la plus grande liberté laissée aux individus avaient perdu leur maître. L'économiste, Nobel en 1976, avait 94 ans. La théorie monétariste qui l'a rendu fameux est née de la critique de l'action de la Réserve fédérale pendant la Grande Crise.

Friedman a imposé l'idée que la meilleure façon d'agir sur l'économie passe par la modification de la masse monétaire. Son credo libéral ne s'appliquait pas qu'au marché. Le penseur le plus célèbre de l'Ecole de Chicago a aussi milité avec succès pour la suppression de la conscription, avec moins de réussite pour la décriminalisation de la consommation de drogue. Son dernier combat était livré en faveur du crédit scolaire («voucher» aux Etats-Unis): les parents doivent pouvoir choisir l'école de leurs enfants, et cette concurrence introduite dans le système améliorera la qualité de l'enseignement.

Milton Friedman n'a jamais eu de fonction publique, mais il a conseillé deux présidents républicains, Richard Nixon et Ronald Reagan. Il approuvait la politique économique de George Bush, lui reprochant seulement de ne pas maîtriser les dépenses. Baisser les impôts et couper dans le budget, y compris dans les programmes sociaux, était à ses yeux le seul moyen de réduire le déficit. Le déséquilibre du commerce extérieur américain ne lui faisait pas peur.

En 1975, avec d'autres économistes de Chicago, Friedman avait fait au Chili, pour rencontrer Augusto Pinochet, un voyage qu'il a porté comme une tache jusqu'au bout. Mais l'économie chilienne est l'une des plus saines d'Amérique latine.