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L’industrie suisse d’exportation vient de vivre le pire semestre de son histoire

Le recul des livraisons de biens à l’étranger atteint 15,6% pour les six premiers mois de l’année, sur un an. Aucune branche ne progresse. Seule bonne nouvelle, le rythme du recul ralentit peu à peu

Les chiffres sont sans appel: l’industrie suisse d’exportation s’est véritablement effondrée au premier semestre de cette année. Les exportations ont plongé de 15,6%, comparé à la période janvier-juin 2008, à 88, 9 milliards de francs, a indiqué mardi l’Administration fédérale des douanes (AFD) dans uncommuniqué. Après correction de l’inflation, la dégringolade est même encore plus brutale et ressort à 17,4%. Des records. Les importations ne résistent guère mieux, avec un recul semestriel nominal de 16,2% à 79,9 milliards de francs.

«La crise ruine trois années de croissance», commente l’AFD. Sur un an, le manque à gagner semestriel pour l’industrie d’exportation dépasse les 16 milliards de francs. Et aucune branche n’a échappé au tumulte.

La chimie «résiste» grâce aux médicaments

En termes nominaux, c’est l’industrie métallurgique qui affiche le plus fort recul pour la période sous revue, avec une dégringolade de 37,5% Les exportations plongent de 27,7% dans l’habillement, d’un quart dans l’industrie des machines et de l’électronique ainsi que dans les matières plastiques. L’horlogerie voit ses livraisons à l’étranger dévisser de 26,3% (et même de 32% en juin). Seule l’industrie alimentaire et du tabac limite la casse avec un recul contenu à 0,5% tandis que la chimie ne diminue «que» de 5,9%. Cette dernière branche est soutenue par les fabricants de médicaments, qui figurent parmi les très rares sous-secteurs à résister.

«Je ne fais pas de prévisions spécifiques pour l’évolution des exportations, mais l’an dernier je n’aurais guère prédit un recul plus important que –10%, qui constitue déjà un plongeon», commente Bernard Lambert, économiste à la banque Pictet & Cie à Genève. Cet observateur rappelle que la chute de la production a déjà eu «des conséquences catastrophiques» sur l’emploi et que la vague des licenciements va continuer. «Le chômage commencera à régresser au mieux à partir du printemps 2010.» Depuis septembre dernier, l’industrie horlogère a supprimé à elle seule quelque 3300 postes, selon les données fournies par l’association patronale de la branche. Mi-juin, à l’occasion de l’assemblée annuelle de Swissmem, l’organisation faîtière de l’industrie des machines, son président Johann Schneider-Amman évoquait la disparition de 10 000 emplois dans la branche depuis le début de l’année. Sulzer, Georg Fischer, Ruag, Conzzeta… La liste des grandes entreprises qui taillent dans leurs effectifs s’allonge de jour en jour.

Fin du tunnel en vue malgré tout

Une petite lueur d’espoir point tout de même à la lecture des statistiques de l’AFD. «En données désaisonnalisées, les exportations n’ont baissé que de 3% au 2e trimestre par rapport au premier, alors que ce recul était encore de 7,2% au 1er trimestre et de 10% au dernier trimestre 2008», se réjouit Bernard Lambert. Il s’attend à ce que la période juin-septembre marque un tassement de la baisse encore plus prononcé.

Chez Sarasin à Bâle, l’économiste Alessandro Bee partage cet optimisme, ajoutant même que les exportations devraient se redresser dès le second semestre. «Les commandes et le sentiment des industriels commencent déjà à se reprendre en Allemagne. Cela aura un impact sur les commandes passées aux industries suisses dans les mois à venir», conclut-il.