Pour l’OMC, l’approche commerciale la plus constructive vient d’Afrique

Rapport L’institution basée à Genève publie son baromètre 2014

Paralysée, l’entité peine à réactualiser sa mission. Elle se cherche une nouvelle génération de réformes à conduire

Le rapport 2014 sur le commerce mondial a été rendu public lundi matin à Genève. Le document, publié par l’Organisation mondiale du commerce (OMC), dresse quatre constats de l’évolution des échanges internationaux à ce jour: les pays en développement ont acquis davantage de poids commercial, ils sont aussi montés en puissance dans la confection de produits intermédiaires (chaînes de valeur mondiales), les prix des denrées alimentaires et des ressources naturelles ont presque doublé depuis 2000, alors que les chocs macroéconomiques ont gagné en synchronisation à l’échelle planétaire.

«Aujourd’hui, ce sont les Africains qui font preuve des perspectives les plus positives à l’égard du commerce», résume Roberto Azevêdo, directeur général de l’OMC. Ces quatorze dernières années, le PIB par habitant des pays en développement a augmenté de 4,7%, alors que leur rythme de croissance en moyenne annuelle était de 1,5% dans les années 1990. Celui des économies développées, par contre, n’a progressé que de 0,9% depuis 2000. Il s’établissait à 2,8% il y a plus de vingt ans. «Toutefois, les nations en développement restent pauvres, leurs revenus par habitant s’établissant à 4% de la moyenne des populations développées», nuance Robert Teh, coauteur du rapport.

La croissance du PIB est allée de pair avec l’intégration dans l’économie mondiale. La part des pays en développement dans la production est ainsi passée, entre 2000 et 2012, de 23% à 40%. Et leur importance commerciale a progressé de 33% à 48%. «De 6% en 1996, les échanges sud-sud s’élèvent aujourd’hui à 25%», précise Roberto Azevêdo.

Ces dernières années, la fragmentation de la production mondiale s’est accélérée. Plus de la moitié des exportations totales – en valeur ajoutée – des puissances dites riches sont désormais effectuées dans le cadre des chaînes de valeur mondiales. Dans ce contexte, la part entre les Etats en développement a quadruplé en vingt-cinq ans.

Tendance à laquelle s’ajoute un changement de paradigme concernant les denrées de base. Les tarifs agricoles et des produits issus de l’extraction minière ont presque doublé en quatorze ans. Cette inflation devrait se maintenir à l’avenir, selon les économistes de l’OMC, tout comme la volatilité des prix sur ces marchés. «Cela, même si nous avons observé récemment une inversion de tendance en ce qui concerne certaines matières premières», indique le directeur général de l’entité basée à Genève.

Enfin, l’OMC a plaidé pour une réponse internationale coordonnée aux crises dont les effets synchronisés à l’échelle planétaire n’ont jamais été aussi forts que depuis 2008-2009. «C’est la troisième, voire la quatrième année consécutive, que le commerce mondial évoluera en dessous [ndlr: 3,1% pour 2014 et 4% en 2015] de sa ligne historique de croissance», regrette Roberto Azevêdo, qui appelle à une mise à jour de l’agenda de son organisation en y adjoignant des «réformes de nouvelle génération».

Invité pour la présentation du rapport 2014 sur le commerce mondial, Marcelo Olarreaga, professeur d’économie politique à l’Université de Genève, s’est livré à une «critique constructive» du document. «L’analyse est trop macroéconomique, trop positive en ce qui concerne la contribution de l’OMC aux échanges, timide lorsqu’il s’agit d’identifier les défis à venir et insuffisamment dotée d’observations microéconomique et interdisciplinaire», a-t-il déclaré, après avoir salué l’important et précieux effort analytique proposé par les experts de l’OMC.

L’institution traverse actuellement une crise sans précédent. Plus que jamais enlisée, sa capacité de négociation se heurte à des difficultés de poursuivre les engagements multilatéraux pris lors de sa dernière Conférence ministérielle de Bali.

«Ce rapport est trop timide, trop positif, trop macroéconomique, avec peu d’éléments interdisciplinaires»