Chimie
Le groupe chimique EMS a fait bondir son bénéfice brut de 16,9% l’an dernier. En marge des résultats annoncés vendredi à Zurich, la patronne de la société en mains de la famille Blocher a évalué les conséquences des mesures protectionnistes de Donald Trump

Magdalena Martullo-Bocher affichait un grand sourire vendredi lors de la présentation des résultats du groupe chimique contrôlé par la famille de la conseillère nationale UDC et patronne d’EMS. Le bénéfice brut (EBIT) bondit de 16,9%, à 548 millions de francs. La marge bénéficiaire grimpe à 27,6%, niveau exceptionnel pour la branche car il est comparable à celui de l’industrie pharmaceutique. Autoneum, aussi actif dans le secteur automobile, réalise par exemple une marge de 8,2%, tout comme Georg Fischer.
Le seul petit regret de la cheffe d’entreprise concerne la progression moyenne du chiffre d’affaires, de 4,1%, à 1,98 milliard de francs. «On avait espéré pouvoir franchir la barre des 2 milliards», confie Magdalena Martullo-Bocher. Les investisseurs ne lui en tiennent pas rigueur. Vendredi en début d’après-midi le cours du titre bondissait de près de 6%, dans un marché SMI et SPI en légère baisse.
Prévisions en hausse pour 2017
Les prévisions établies pour 2017 font état d’une légère hausse du chiffre d’affaires net et du bénéfice d’exploitation. Les mesures protectionnistes attendues de la part du président américain Donald Trump, principalement au Mexique et en Chine, deux marchés cruciaux pour le secteur automobile, sont-elles intégrées dans cette estimation? «Oui, car les constructeurs ne peuvent pas déplacer leur production du jour au lendemain. Il faut compter deux ou trois ans pour construire une nouvelle usine, constate Magdalena Martullo-Bocher. De toute manière, EMS peut faire preuve de beaucoup de souplesse. Et s’il faut livrer des pièces aux Etats-Unis plutôt qu’au Mexique, on le fera», affirme Magdalena Martullo-Bocher, qui constate une certaine inquiétude de ses clients, parmi lesquels General Motors (GM).
La patronne du groupe relève aussi un effet d’annonce des constructeurs. Toyota a par exemple annoncé un investissement de 10 milliards de dollars (10,04 milliards de francs) dans les cinq ans aux Etats-Unis, mais cela correspond au plan initial antérieur à l’élection de Donald Trump. Ford a aussi planifié la construction d’une usine dans l’Etat du Michigan, au lieu du Mexique, qui fournira 700 emplois. En tout, les trois gros constructeurs américains (GM. Ford, FiatChrysler) ont promis la création de près de 10 000 emplois sur sol américain.
Les consommateurs américains seront-ils d’accord de payer leur voiture 20% plus cher?
Magdalena Martullo-Bocher livre quelques petits calculs qui la rendent sceptique quant à l’acceptation des mesures par la population. «Les coûts de fabrication au Mexique, qui fournit une main-d’œuvre qualifiée très motivée, sont 15 à 20% meilleur marché qu’aux Etats-Unis. Les consommateurs américains seront-ils d’accord de payer leur voiture 20% plus cher?», se demande-t-elle. Depuis l’entrée en vigueur, en 1994, de l’accord de libre-échange nord-américain, le nombre d’usines automobile au Mexique a doublé, et la production, destinée principalement aux Etats-Unis, a plus que triplé pour se situer à 3,5 millions de véhicules par an. 6 millions d’emplois aux Etats-Unis dépendent directement du commerce avec le Mexique qui représente un volume annuel de 535 milliards de dollars.
Si les mesures douanières évoquées par Donald Trump, à savoir une taxe de 45% sur les importations de Chine, et de 20% sur celles en provenance du Mexique sont réalisées, chaque citoyen américain devra dépenser en moyenne 800 dollars supplémentaires par an, qui ne seront pas entièrement compensés par la réduction du taux d’imposition, envisagée à 15%. «On peut aussi craindre des mesures de rétorsion douanières antidumping dans plusieurs pays si un mouvement de hausse des taxes est lancé aux Etats-Unis», estime la patronne d’EMS.