Les marchés ont eu le réveil difficile mardi matin, et sont restés dans le rouge tout au long de la journée. L’euphorie de la veille laisse place aux inquiétudes. Le plan de stabilisation européen annoncé par Bruxelles et la décision de la banque centrale de racheter des obligations souveraines avait provoqué un soulagement qui s’était immédiatement traduit par des hausses à deux chiffres sur de nombreuses places européennes. Mais la perspective des mesures d’austérités qui devront être prises dans toute l’Europe et les longues années de récession qui s’ensuivront a ramené mardi matin les bourses à la réalité.

Toutes les mesures de «colmatage» sur les marchés sont suivies d’ajustements dans l’économie réelle, commentait hier soir déjà un économiste cité par Bloomberg. «C’est ce qui s’est passé en Asie à la fin des années 90, et aux Etats-Unis en 2008-2009. C’est ce qui se passera en Europe et dans les pays voisins, où l’on peut s’attendre à des récessions de longue durée dans les années à venir.»

Et nombre de voix s’élèvent déjà pour mettre en garde contre un soulagement trop hâtif: «On ne résout pas une crise de la dette par un endettement supplémentaire», avertit Christian Blaabjerg, chef économiste de la banque Saxo cité par Bloomberg. Des propos que tient aussi son homologue chez Barclays, Thorsten Polleit, cité par Le Monde: «Pour soutenir certains pays pris dans une crise de dette, les gouvernements vont devoir emprunter encore. Ce n’est pas une solution. L’urgence aujourd’hui pour la zone euro, c’est d’annoncer une stratégie crédible de réduction des déficits». «Les marchés vont certainement revenir tester la volonté de l’UE et de la BCE de régler cette dette immense», prédit encore Christian Blaabjerg.

L’euro, qui avait gagné 2,7% contre le dollar dans la seule journée de lundi, a effacé ses gains de la veille, pour évoluer autour de 1,2734 dollar, soit 0,2% de moins qu’à la fin de la semaine passée. «Les marchés ont vite réalisé que cette crise ne peut pas être réglée simplement en injectant des liquidités, aussi importantes soient-elles», commente pour l’agence Bloomberg le responsable du trading des devises de Mitsubishi UFJ à Tokyo. «Le problème structurel de la zone euro persiste. Je ne suis pas surpris du tout que l’euro faiblisse à nouveau.»

Toutes les bourses européennes, qui avaient ouvert en baisse de 1 à 2%, ont dans l’ensemble clôturé sur des reculs de 1 à 3%. Athènes, termine à -2,4%, contre +9,13% la veille, Madrid à -3,3%, contre +14,4% la veille. Paris a terminé à -0,73%, Londres à -0,99% et Francfort à + 0,33. «Les marchés ont donné une réponse excessive, comme parfois hier avec des montées d’indices comme on n’en avait pas vu depuis vingt ans, et comme on n’en avait jamais vu dans certains pays», a commenté mardi la ministre française de l’Economie Christine Lagarde sur France Culture.

New York, qui avait ouvert en baisse, est revenu dans le vert à la mi-séance. Les marchés asiatiques ont clôturé mardi matin en repli de près de quelque 2%, alors que la Chine a annoncé une inflation record de 2,8% en avril par rapport à la même période de l’année précédente, avec des prix de l’immobilier flambant de 12,8%.

Et alors que les mesures de rachat d’obligations souveraines annoncées la veille par la BCE s’étaient traduites par une détente spectaculaire des taux des obligations d’Etat grecques, ces derniers se sont tendus à nouveau mardi matin. Le rendement de l’obligation grecque à 10 ans affichait 7,338% à la mi-journée, contre 6,717% la veille au soir. Alors qu’il avait atteint en fin de semaine dernière son plus haut niveau depuis l’entrée de la Grèce dans la zone euro en 2001, à 12,65% en séance, il avait enregistré lundi un plongeon de 540 points de base.

L’agence de notation Moody’s a averti lundi soir qu’elle pourrait abaisser encore la note des obligations d’Etat grecques, ce qui les reléguerait au rang d’investissements spéculatifs. Les perspectives économiques du pays restent très faibles, estime l’agence.