Horizon
Le directeur du Centre suisse d’électronique et de microtechnique, Mario El-Khoury, présente les projets de son laboratoire. Une plongée dans un futur numérique pas si lointain

Le mardi 29 janvier a eu lieu le Forum Horizon, au Campus Biotech à Genève. Retrouvez les résumés des interventions de nos experts.
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La Suisse est numéro un en microtechnologies. Mario El-Khoury, le directeur du Centre suisse d’électronique et de microtechnique (CSEM) ne peut que s’en réjouir. Après s’être fait son renom dans l’horlogerie avec la création de la montre à quartz en 1967, son laboratoire de recherche et développement n’a eu de cesse de se positionner dans le peloton de tête des créateurs de projets innovants.
On définit ce domaine comme étant celui de la deep technology. Il s’agit du développement de technologies fortes, uniques et innovantes qui ont pour ambition de résoudre les grands défis que le XXIe siècle présentera.
Pour exemple, Mario El-Khoury évoque la dernière réussite à laquelle son laboratoire a contribué: le bracelet connecté de la start-up Ava, qui permet de répondre à la baisse de fertilité due au changement de mode de vie à laquelle l’humanité doit faire face. Commercialisée depuis 2017 en Suisse, la technologie a fêté son premier «bébé AVA» en 2018. «Nous avons rendu plus de 1000 couples heureux. Ces bracelets connectés permettent aujourd’hui entre 15 et 20 grossesses dans le monde par an», souligne Mario El-Khoury.
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99% des données transmises ne servent à rien
Sur le tableau derrière le conférencier, la photo d’un nouveau-né aux yeux bleus adorable et souriant est projetée. Dans quel univers ces bébés vont-ils grandir? Le chercheur décrit alors un monde ultra-connecté. Les dispositifs vont évoluer, la protection des données va s’améliorer et l’énergie sera économisée. «Parmi les données transmises, 99% ne servent à rien. Ce n’est pas grave qu’elles soient inutiles, mais cela mène à une catastrophe écologique, car le traitement de cette information demande de l’énergie.» Les erreurs des anciennes technologies doivent être rattrapées grâce aux nouvelles.
En guise d’exemple, le chercheur présente à l’audience une caméra de la taille d’une phalange qui permettra de transmettre les données nécessaires à une prise de décision: baisser le chauffage, par exemple, si le nombre de personnes dans la salle est suffisant. Et si ce n’est pas une caméra qui récolte l’information, la tâche peut être effectuée grâce à des poussières intelligentes ou un post-it photovoltaïque.
L’importance de l’aspect salutaire
Citant Nikola Tesla, l’inventeur du courant alternatif qui, avant de sombrer dans la folie, avait déclaré «la science n’est qu’une perversion si son but n’est pas d’améliorer les conditions de l’humanité», Mario El-Khoury met l’accent sur l’aspect salutaire des technologies pour l’humanité.
Il souligne également qu’elles le sont pour l’économie suisse. Ces projets présentés génèrent du travail dans le pays. «La Suisse maintient 20% des postes de travail dans le secondaire. Connaissant le coût de la main-d’œuvre, c’est un miracle qui a lieu grâce à l’innovation.» Selon l’expert, la Suisse a d’excellents atouts à faire valoir dans le cadre de la quatrième révolution industrielle. L’UE soutient d’ailleurs cette volonté.
Elle a en 2018 investi 618 millions de dollars pour promouvoir les recherches dans les deep tech en Suisse. Une somme similaire à celle qu’elle avait allouée entre 2013 et 2017, plaçant la Confédération à la quatrième place du classement des pays les plus innovants en termes de recherche.