France
La cour d’appel de Paris a confirmé mercredi la mise en examen du cimentier, dans une affaire concernant ses activités jusqu’en 2014 en Syrie. Sa maison-mère Holcim a fait savoir que le groupe se pourvoira en cassation pour faire annuler cette décision

La cour d’appel de Paris a confirmé mercredi la mise en examen du groupe cimentier Lafarge pour «complicité de crimes contre l’humanité» concernant ses activités jusqu’en 2014 en Syrie, a appris l’AFP de sources proches du dossier.
Dans le cadre de cette information judiciaire objet de nombreux rebondissements procéduraux, le groupe, désormais filiale du Suisse Holcim, est soupçonné d’avoir versé en 2013 et 2014, via une filiale, plusieurs millions d’euros à des groupes terroristes, dont l’organisation Etat islamique (EI), ainsi qu’à des intermédiaires, afin de maintenir l’activité d’une cimenterie en Syrie à Jalabiya alors que le pays s’enfonçait dans la guerre. Le groupe avait investi 680 millions d’euros dans la construction de ce site, achevé en 2010.
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La cour d’appel a suivi sur ce point les réquisitions du parquet général qui estimait que l’entreprise avait «financé, via des filiales, les activités de l’EI à hauteur de plusieurs millions de dollars, en connaissance précise des agissements». Contre cette fois l’avis du parquet général, la cour d’appel a prononcé le maintien de la mise en examen de Lafarge pour «mise en danger de la vie d’autrui», c’est-à-dire des ex-salariés syriens qui ont été amenés à continuer leur activité dans la cimenterie de Jalabiya alors que la région était en proie à la guerre civile.
«Etape importante» pour les parties civiles
Le groupe avait obtenu de la cour d’appel de Paris en novembre 2019 l’annulation de sa mise en examen en 2018 pour «complicité de crimes contre l’humanité». Mais en septembre 2021, la Cour de cassation, plus haute juridiction judiciaire française, avait cassé cette décision de la cour d’appel, ainsi que le maintien de la mise en examen du groupe pour «mise en danger de la vie d’autrui». Elle avait renvoyé ces deux questions devant la chambre de l’instruction, dans une composition différente.
Les avocats de Lafarge, Me Christophe Ingrain, Rémi Lorrain et Paul Mallet, n’ont pas souhaité commenter. Les parties civiles ont salué une décision «emblématique» ainsi qu’une «étape importante» dans cette information judiciaire ouverte en juin 2017.
Dans un communiqué, Holcim a fait savoir que «Lafarge fera appel de cette décision devant la Cour suprême», c’est-à-dire que la filiale va se pourvoir en cassation. «Il est important de préciser que cette décision n’est pas un jugement», souligne la multinationale zougoise. «Il s’agit de déterminer l’étendue des chefs d’accusation examinés».
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Le géant des matériaux de construction rappelle que «les événements survenus chez Lafarge ont été dissimulés à notre conseil d’administration au moment de la fusion en 2015 et sont en totale contradiction avec nos valeurs». A la Bourse suisse, le titre Holcim perdait 2,6% à 46,63 francs, dans un SMI en baisse de 0,6%.