«Nous ne cannibalisons pas nos offres»

Le Temps: Vous avez lancé il y a une semaine «iO», une application pour smartphone permettant d’effectuer des appels via Internet et d’envoyer des messages. Ne vous mettez-vous pas en danger avec ce service qui concurrence vos services traditionnels?

Carsten Schloter: Non, nous ne cannibalisons pas nos offres. Nous prenons simplement les devants face à une évolution technologique inéluctable. Il y a dix ans, la voix représentait 9 milliards de francs, soit la quasi-totalité de notre chiffre d’affaires. Aujourd’hui, elle ne pèse qu’environ 2 milliards. L’ensemble des services migre vers Internet, où des sociétés telles WhatsApp et Viber ne paient pas un centime pour utiliser notre réseau. Nous voulons du coup nous renforcer sur l’accès au réseau, en offrant la meilleure infrastructure, et en nous lançant aussi sur ces services internet.

– Mais face aux dizaines de millions d’utilisateurs de WhatsApp, «iO» est minuscule.

– Nous comptons déjà 220 000 utilisateurs, dont seulement 54% étaient auparavant clients chez nous. Donc, si nous pouvons vendre à des clients Orange ou Sunrise un pack supplémentaire coûtant 15 ou 25 francs par mois pour des appels illimités en Suisse ou vers l’étranger, ce sera toujours cela de gagné face à nos concurrents. De plus, ces clients ne seront peut-être pas satisfaits de la qualité des communications «iO» sur le réseau de ces concurrents – ils passeront peut-être ainsi chez Swisscom…

– Certes, mais «iO» demeure une petite communauté.

– Non, car l’application permet, en payant un supplément, d’appeler six milliards de Terriens. Viber ne permet pas cela. Tout comme WhatsApp ne permet pas d’envoyer des messages à tous les téléphones. J’ajoute que «iO» devra permettre, en 2014, de dévier très facilement les appels de son téléphone fixe vers son mobile, ce qui ouvre de nouvelles perspectives aux particuliers et aux PME.

– Le directeur d’Orange a récemment estimé que vos abonnements mobiles s’adressaient surtout aux riches…

– C’est ridicule. Dès qu’ils optent pour Infinity, nos clients [ndlr: abonnement mobile sans limite de données] doublent le volume de données téléchargées. Télécharger 3 Go de données, notamment si l’on utilise des applications telle Spotify [streaming de musique], cela arrive très vite. Donc les offres tarifaires d’Orange sont un frein pour les consommateurs.

– Que pensez-vous du projet européen de supprimer le roaming?

– C’est irréaliste, car cela ne tient pas compte des spécificités de chaque pays. Si le Luxembourg a les tarifs les moins élevés, toute l’Europe va acheter des cartes SIM dans ce pays et plus aucun autre opérateur européen ne sera capable d’investir chez lui.