Nestlé abandonne une campagne de promotion en Turquie, Novartis y songe
Polémique
Les deux multinationales suisses participaient jusqu’ici à une opération de communication lancée par le gouvernement d'Ankara pour redorer le blason de la Turquie. Nestlé a récemment décidé de suspendre sa participation, selon le «Financial Times»

Nestlé et Novartis ont un problème d’image en Turquie. Les deux entreprises suisses participaient jusqu’ici à une campagne de promotion lancée fin mars par le gouvernement de Recep Tayyip Erdogan et destinée à redorer l’image du pays. Nestlé a d’ores et déjà suspendu sa collaboration et Novartis y songe, selon une information révélée jeudi par le «Financial Times». Le climat tendu instauré suite au référendum constitutionnel qui a renforcé les pouvoirs du président semble avoir changé la donne.
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Participation en suspens
«Notre participation à cette campagne est actuellement à l’arrêt. Nous examinerons les étapes à venir dans un futur proche», a précisé Nestlé au quotidien britannique. Présente dans le pays depuis 107 ans, la multinationale suisse y emploie directement plus de 3800 personnes. Quelles sont les raisons de cette volte-face? «La campagne devait être initialement lancée en octobre 2016, bien avant le référendum, détaille un porte-parole de Nestlé au «Temps». Le gouvernement de Receyp Tayyip Erdogan a modifié le calendrier et les détails de la campagne.» Pourquoi avoir choisi, dans un premier temps, de participer à cette opération de charme? Cela «fait partie de notre engagement envers le développement en Turquie, comme dans de nombreux autres pays où nous opérons».
Le groupe pharmaceutique Novartis, implanté depuis 1950 en Turquie, a quant à lui fait savoir que son implication dans le projet, censé durer un an, était toujours d’actualité. «Nous continuons de surveiller attentivement les événements, précise toutefois sa directrice de la communication pour la Suisse. Novartis, comme d’autres entreprises internationales, soutient la campagne de promotion de la Turquie en tant que site économique. Nous employons près de 2 300 personnes dans la production, la vente et la recherche et développement.»
Menée par le ministre de l’Economie Nihat Zeybekci, l’opération de promotion implique 17 multinationales, parmi lesquelles Samsung, General Electric et Ford, mais aussi des firmes françaises telles que le groupe pharmaceutique Sanofi et l’assureur Axa. L’enjeu? Promouvoir l’attrait économique de la Turquie et stimuler les investissements. Le tout au moyen d’affiches et de courtes vidéos, accompagnées du slogan: «Venez en Turquie et découvrez votre propre histoire.» A la suite notamment d’attaques terroristes et de l’instabilité politique, le pays a vu sa croissance baisser de 6,5% en 2015 à 2,9% en 2016.
«Raconter la Turquie de l’intérieur»
«Nous allons répondre à la propagande contre la Turquie en informant un public de plus de 500 millions de personnes dans sept pays», a déclaré Mehmet Büyükeksi, président de l’Assemblée des exportateurs turcs, lors de la cérémonie de lancement de cette campagne le 27 mars dernier. Des propos rapportés par le site turc Daily News Hurriyet. Prévue pour être diffusée au Royaume-Uni, en France, en Allemagne, en Russie, en Italie, aux Etats-Unis et aux Émirats Arabes Unis, la campagne entend permettre aux investisseurs étrangers de raconter la Turquie à leur manière.
Si Nestlé et Novartis se montrent désormais frileux, d’autres sociétés ne remettent pas en cause leur engagement. Le groupe japonais Toyota a par exemple déclaré au «Financial Times»: qu’il «poursuivra ses activités en Turquie en faveur d’une croissance durable.»
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En 2015, le volume des échanges commerciaux entre la Suisse et la Turquie s’élevait à 3,2 milliards de francs. La Suisse figurait alors au douzième rang des investisseurs internationaux dans ce pays, selon le site du Département fédéral des Affaires étrangères.