Nette hausse des offres d'emploi des très grands groupes depuis la fin du cours plancher
Conjoncture
En Suisse, les offres d’emploi en ligne ont baissé de 2,3% entre la fin 2014 et la fin 2015. Mais les grandes sociétés continuent d'engager. La différence entre les services à l’exportation, en hausse, et l’industrie, en baisse, est très sensible, montre une étude de la fondation CH2048

«Un an après la fin du cours plancher, les données des offres d’emploi des sites internet de 300 000 entreprises permettent de dégager des tendances intéressantes pour l’avenir», explique Christoph Koellreuter, vice-président de la fondation CH2048. Le placement d’une offre traduit, à son avis, un engagement de l’entreprise et la mise en œuvre de la future stratégie. «Ces chiffres ont donc valeur d’indicateur avancé. Le profil exigé a également valeur indicative», a-t-il poursuivi.
En outre, le fait de saisir les données directement auprès des entreprises élimine le risque de compter à double. L’économiste bâlois, sur mandat d’Employés Suisse et de la société x28, a analysé la situation au sein des différentes branches. L’analyse porte sur la période où la Suisse avait un cours plancher (offres d’emploi du quatrième trimestre 2012 à la fin 2014) et la phase sans cours plancher (quatrième trimestre 2014 au quatrième trimestre 2015).
Baisse de 2,3% en un an
Entre la fin 2012 et la fin 2014, à la veille de la fin du cours plancher, les offres d’emploi se sont accrues de 15%. Puis de la fin 2014 au quatrième trimestre 2015, elles ont baissé de 2,3% pour atteindre 95 100, selon Christoph Koellreuter. Cette évolution ne surprend guère en raison de l’augmentation de la valeur réelle du franc.
Les petites entreprises (1 à 10 employés) présentent une baisse plus forte que la moyenne (-5%) depuis la fin du cours plancher. Le recul n’est que de 2,5% pour les PME de 100 à 1000 emplois. Par contre, les entreprises de plus de 1000 collaborateurs (25% du total) indiquent une hausse des offres d’emploi de 2%. L’augmentation est encore plus forte auprès des 20 plus grands groupes suisses (+15%). Elle est même de 39% pour le Top 4 représenté par Novartis, Roche, Credit Suisse et UBS. Christoph Koellreuter l’interprète par une demande accrue pour les fonctions de quartier général. La part des offres de cadres-dirigeants s’est en effet légèrement accrue (de 13,6% à 13,8%).
Croissance dans les métropoles
Sur le plan géographique, l’étude souligne également une concentration accrue sur les métropoles, lesquelles assurent 58,5% des offres d’emploi, contre 58,3% il y a un an.
«Le changement de tendance en un an est particulièrement frappant dans l’industrie, où les offres d’emploi ont diminué de 11% en un an, après une hausse de 12% depuis la fin 2012 jusqu’à la fin 2014. Depuis la fin du cours plancher, la baisse atteint 20% dans la construction de véhicules, 18% les machines, la métallurgie, l’alimentation, le textile, le bois et les meubles et 13% l’horlogerie. Le recul est de 10% dans l’électrotechnique, les techniques médicales et l’optique.
La grande exception vient de l’industrie pharma, y compris la chimie, avec une hausse de 8% des offres d’emploi depuis un an. Selon Christoph Koellreuter, la part industrielle de la valeur ajoutée en Suisse «reste malgré tout stable et élevée». A son avis, le site suisse reste prédestiné pour les emplois à forte productivité. Les branches et entreprises présentes sur ce segment «n’auront aucune peine de se maintenir malgré le niveau de coût très élevé en Suisse». Or la productivité de la pharma est 4 fois plus élevée que la moyenne, l’horlogerie 1,5 fois.
Christoph Koellreuter demande de «ne pas surinterpréter la baisse dans l’horlogerie» dans l’optique du maintien de cette industrie en Suisse. Elle succède à une hausse des offres d’emploi en ligne de 33% entre 2012 et 2014 et la productivité de la branche dépasse la moyenne.
Progression dans les services financiers et le tourisme
Le contraste est fort entre l’industrie et les branches des services liés à l’exportation (services financiers, commerce de gros, assurance, recherche, tourisme, hôtellerie). Les offres d’emploi de ces derniers sont en hausse de 11% depuis un an, alors qu’elles diminuent de 12% dans l’industrie d’exportation.
L’augmentation dans les services à l’exportation augmente toutefois moins qu’entre 2012 et la fin 2014 (24%). Ces services, qui à l’image du tourisme et de la gestion de fortune, amènent le client à se déplacer vers le prestataire de services, ont un bel avenir, selon l’économiste. Leur sort dépend avant tout du positionnement des entreprises et des conditions-cadres réglementaires et fiscales. L’attrait du site suisse auprès des services est illustré par la hausse de 54% des offres entre 2012 et la fin 2014 dans les services financiers, 23% la recherche et 19% l’assurance. Depuis la fin du cours plancher, les offres ont toutefois diminué de 5% dans la recherche et 3% l’assurance. Elles se sont accrues de 11% dans les services financiers depuis un an, 1% dans le commerce de gros et 27% le tourisme. La progression dans ce dernier domaine peut surprendre. Selon l’économiste, elle peut être attribuée au besoin non seulement d’une main-d’œuvre qualifiée, mais aussi d’un personnel aux tâches peu attractives et souffrant d’un fort taux de fluctuation. En outre, la demande en Suisse centrale et le tourisme urbain se portent nettement mieux que la demande liée aux sports d’hiver.
Enfin, le secteur domestique, qui représente 55% de toutes les offres, n’est pas immunisé aux variations du franc. Il accuse une baisse des offres d’emploi de 4,5% depuis la fin du cours plancher après une hausse de 13% entre la fin 2012 et la fin 2014.
La liste des métiers les plus touchés par les baisses d’offres depuis un an est liée à l’industrie: Mécaniciens, polymécaniciens, ingénieurs, assistants administratifs, chefs de projets, agent au service extérieur. Par contre, on constate une offre en hausse pour les cuisiniers et les menuisiers.