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«Nos autorités tergiversent, pas le Luxembourg»

La fiscalité des gérants alternatifs est trop élevée.

Le Temps: La réforme de la loi sur les fonds de placement rendra-t-elle la Suisse plus compétitive pour attirer les gérants alternatifs?

Pierre Mirabaud: Nous sommes globalement contents de la LPCC, mais nous avons le sentiment d'une immense opportunité manquée. Le Conseil fédéral ne cesse de répéter que nous devons êtres compétitifs. Quand je vois certains aspects de la LPCC, je me dis que ce ne sont que de belles paroles. Si la loi, qui prévoit la structure de sociétés en commandite, ouvre la porte aux sociétés de hedge funds et fonds de private equity, les autorités ont tout simplement omis l'accompagnement fiscal qui attirera les talents. Les gérants alternatifs doivent encore payer un taux très élevé sur leur participation à la performance du fonds, jusqu'à 40%, contre 15% à New York et 12% à Londres.

  • L'ASB a-t-elle activement défendu ce point de vue?

  • Bien entendu. Nous avons approché le conseiller fédéral Hans-Rudolf Merz, mais il semble que nous ayons essuyé de l'administration fédérale des contributions une fin de non-recevoir. C'est d'autant plus incompréhensible que la BNS et la Commission fédérale des banques y étaient favorables.

Avec cette loi, on ne va pas ramener un seul fonds luxembourgeois en Suisse. Car au moment où nos autorités tergiversaient, le Luxembourg, justement, a encore assoupli son cadre légal, parce qu'il voyait l'Irlande lui prendre des parts de marché. Nous avons plusieurs guerres de retard.

  • Alors, qu'est-ce qui peut attirer les talents en Suisse?

  • Entres autres, le cadre de vie exceptionnel...

  • Parmi ces talents, il s'en trouve de sulfureux, comme le gérant de hedge funds Philippe Jabre, qui s'installe à Genève alors que son activité a été suspendue à Londres suite à un délit d'initié. Est-ce ainsi que l'on renforce l'image de la place financière suisse?

  • Je ne commente pas de cas particuliers. Mais la venue de qui que ce soit en Suisse qui aurait l'interdiction d'exercer ailleurs pose problème. Cela entraîne une mauvaise publicité pour la place. La CFB ne pourra pas très longtemps soutenir que la surveillance des gérants indépendants n'est pas de son ressort.

Certes, les sociétés financières peuvent se soumettre volontairement à sa surveillance, et la CFB espère ainsi couvrir 75 à 80% du marché. Mais j'en doute. La CFB devrait être plus proactive au lieu d'attendre que les pressions de l'extérieur augmentent, ce qui est déjà le cas avec le récent rapport du Groupe d'action financière (GAFI).