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La nouvelle LPP ignore les bas revenus et le temps partiel

Le message de la première révision de la Loi sur la prévoyance professionnelle est mis en consultation. Il prévoit une hausse des cotisations pour compenser les effets du vieillissement démographique. Le projet entraînera des coûts supplémentaires de 355 millions au maximum

C'est une version bâtarde du projet de première révision de la Loi sur la prévoyance professionnelle (LPP) dont le Conseil fédéral a mis mercredi le message en consultation. Elle l'est pour deux raisons. D'abord, parce que si la volonté d'aligner cette loi et les dispositions de la LPP sur l'AVS subsistent, celle d'améliorer la situation des personnes à revenus modestes et des travailleurs à temps partiel a disparu. Ceci fait hurler les syndicats comme l'USS, qui parle de «gifle pour les femmes». Ensuite, parce que le plafonnement du revenu assurable du 2e pilier, évoqué dans le cadre du programme de stabilisation financière de 1998, est discrètement réintroduit.

Globalement cependant, c'est l'impact du vieillissement démographique qui motive l'adaptation des conditions techniques de la LPP. Les cotisations devront augmenter au maximum de 0,2% du salaire AVS dans 15% à 25% des caisses de pension pour que leurs prestations de retraite puissent être maintenues à long terme.

Dans une première prise de position, l'Union patronale refuse ce prélèvement sur les salaires. Mais cette adaptation ne concernera pas la majorité des caisses de pension, qui appliquent déjà au moins deux fois les minima des règles actuelles. D'autres, dans l'hôtellerie ou la paysannerie, pourraient être plus touchées. Mais cette hausse des cotisations est nécessaire pour compenser les coûts de cette révision de la loi. Ils sont estimés entre 145 et 258 millions en 2003 et devraient atteindre un maximum de 355 millions en 2015. Ils proviennent des effets de l'augmentation des bonifications de vieillesse servant à compenser la baisse du taux de conversion, qui passera de 7,2% aujourd'hui à 6,65%.

Le taux de conversion est celui par lequel on multiplie les avoirs accumulés pour calculer la rente de retraite. Il dépend de l'espérance de vie. Vivre plus vieux signifie vivre plus longtemps sur un même avoir accumulé. Baisser le taux de conversion revient à prendre en compte l'allongement de l'espérance de vie pour que les rentes, qui devraient logiquement baisser, puissent être versées plus longtemps. Pour empêcher cette baisse, la révision de la LPP prévoit donc d'augmenter les bonifications de vieillesse, c'est-à-dire les avoirs accumulés avec lesquels sera calculée la rente de retraite. Et donc, d'augmenter les cotisations pour les caisses qui n'ont fait que le minimum. Ou de permettre aux autres de prendre dans une partie de leur bas de laine financier en disposant, par exemple, des fonds amassés dans le cadre de mesures dites spéciales. C'est ce que prévoit la révision.

La solidarité remise en cause

Au-delà de ces mesures techniques, la révision de la loi prévoit d'aligner ses conditions sur celles de l'AVS. Ceci concerne l'âge de la retraite, la retraite à la carte, la rente de veuf et le quart de rente invalidité. Mais rien ne sera fait pour les bas salaires et les travailleurs à temps partiel. Ce recul par rapport au projet initial tiendrait à des raisons techniques. D'une part, il aurait fallu beaucoup baisser les salaires coordonnés sur lesquels sont calculés les montants LPP pour y inclure les plus bas revenus. Les coûts induits auraient été prohibitifs. D'autre part, pour le travail à temps partiel, il a été impossible de quantifier réellement les besoins.

Enfin, le message satisfera l'Administration fédérale des contributions. Il prévoit en effet de plafonner à 361 800 francs (soit cinq fois le montant supérieur du régime obligatoire, contre quatre fois dans le projet) le revenu soumis à la LPP. Cette idée, discutée lors du programme de stabilisation, avait été abandonnée sous la pression politique. Elle revient: cela signifie que les très hauts salaires ne seront pas couverts par la LPP, mais qu'ils seront mieux ouverts à l'appétit du fisc.

Politiquement, les conséquences de cette proposition seront difficiles à gérer. Elle pose en effet la question de la solidarité totale dans le deuxième pilier, qui n'est plus garantie avec cette limite salariale supérieure. Et celle de la cohérence avec le troisième pilier, c'est-à-dire avec la constitution d'une épargne de retraite purement individualisée, qui est ainsi nettement favorisée.