Ces dernières années, les places de port se sont révélées un investissement meilleur que la pierre. «La valeur de mon anneau a triplé en six ans. A 60000 euros, il vaut désormais plus que mon bateau», déclare Frédéric D., propriétaire de Pavane, un voilier de 10 mètres amarré à Pornic (Loire-Atlantique).

La Fédération française des industries nautiques s'alarme du manque d'abris pour les bateaux: elle estime le déficit à 54000 sur un total de 226000 places de port dans l'Hexagone. Cette situation, qui a tendance à empirer, témoigne d'un engouement sans précédent pour la plaisance. Ce marché qui, dans le monde, pèse plus de 16 milliards de francs de chiffre d'affaires annuel affiche une croissance de l'ordre de 7% en moyenne, d'après HSBC.

La Suisse dans le haut de gamme

Cette progression rapide est en partie d'origine démographique. Les «papy-boomers» qui partent en retraite en bonne santé grossissent les rangs des navigateurs. Par ailleurs, l'envolée des prix de l'immobilier sur le littoral a un effet dissuasif sur les candidats à l'acquisition d'une résidence en bord de mer; certains se reportent sur l'achat d'un bateau, ajoute HSBC.

En France comme en Suisse, l'exiguïté des ports est le principal frein à la croissance du secteur. «Sur le Léman, on n'aurait pas de difficulté à remplir 1000 places supplémentaires», affirme Pierre-Gilles Vidoli, qui gère le Port-Vidoli à Crans (VD).

Cela n'empêche pas les constructeurs, comme le français Bénéteau et l'américain Brunswick, de faire de bonnes affaires. Le premier, qui accapare le quart du marché mondial des voiliers, prévoit une progression de 50% de ses ventes sur cinq ans. Le second, qui fabrique un bateau à moteur sur cinq dans le monde, pèse 2,8 milliards de dollars à la Bourse de New York. Mais Brunswick, une société fondée par un immigrant suisse au milieu du XIXe siècle, souffre déjà du ralentissement conjoncturel aux Etats-Unis. Le mois dernier, elle a abaissé ses prévisions de bénéfice.

Un souci que ne semble pas partager Rodriguez, un spécialiste des yachts de plus de 24 mètres. Cette entreprise basée à Cannes enregistre une croissance de ses ventes de plus de 20% depuis dixans. Elle profite de la multiplication du nombre des milliardaires. Leur pouvoir d'achat semble peu dépendre de la santé de l'économie.

En Suisse, les rares constructeurs de bateaux exploitent des niches haut de gamme, comme Boesch, à Kilchberg (ZH). Les prix de ses vedettes en acajou démarrent à 118000 francs.