L'action française fait tache d'huile
Un troisième dossier litigieux, le projet de reprise d'Arcelor par Mittal Steel, groupe britannique basé aux Pays-Bas et dont l'actionnaire majoritaire est d'origine indienne, met aussi en exergue le protectionnisme économique qui prend racine en Europe. La France et le Luxembourg, actionnaire d'Arcelor, ont tout fait pour bloquer la fusion. Jeudi, comme pour donner un coup de grâce, Thierry Breton, le ministre français des Finances, a déclaré que les informations qui lui ont été soumises sont «clairement insuffisantes» pour donner suite au projet.
La France fourmille d'autres outils de protection. Le premier ministre, Dominique de Villepin, affirme que les intérêts français passent avant ceux des Vingt-Cinq. Il souhaite renforcer le rôle de la Caisse de dépôts et consignations comme investisseur public. Par ailleurs, le parlement a voté une liste d'activités économiques interdites aux capitaux étrangers.
Début de débat en Grande-Bretagne
L'Italie, même si elle fulmine contre la politique française, n'est pas toute blanche. L'an dernier, elle a défendu bec et ongles ses banques contre des OPA européennes. Le Portugal et la Pologne ont également pris des mesures pour protéger des entreprises nationales des capitaux étrangers.
La dérive protectionniste semble même frapper le bastion européen du libéralisme, la Grande-Bretagne. Les Echos note que le rythme des acquisitions commence à «affoler même les plus libéraux des libéraux anglo-saxons». Le quotidien français ajoute que pour l'heure, «au lieu de se draper dans l'Union Jack», ces derniers «se contentent de soulever des objections techniques et de séduire les actionnaires en augmentant les dividendes».
Mercredi, c'est le président de la CE, José Manuel Barroso, qui est monté au créneau pour exiger qu'on «arrête immédiatement la rhétorique nationaliste». Selon lui, «les Etats membres semblent se défendre les uns contre les autres. L'Europe ne peut pas progresser avec des barrières entre les Etats.»
«Ces instincts nationalistes et protectionnistes sont difficiles à concilier avec l'idée d'une intégration européenne», explique Elie Cohen, économiste français interrogé jeudi par l'International Herald Tribune. Et d'avertir que «l'Europe n'arrivera pas à faire face à la concurrence que représentent l'Inde et la Chine si elle choisit l'approche nationaliste».