Le président du comité d'établissement Perrier ne voit pas les choses ainsi. «Nestlé veut supprimer 356 emplois rien que chez Perrier, soit un quart des effectifs, alors que l'objectif visé est de vendre 1,2 milliard de petites bouteilles vertes en 2010, contre 500 à 600 millions aujourd'hui. On ne peut pas traiter le capital humain de cette façon.»
Peter Brabeck, administrateur délégué, n'a pas réitéré la menace de vendre Perrier si les syndicats refusent d'entrer en matière sur une augmentation de la productivité. Frits van Dijk, patron de Nestlé Waters, a cependant bien fait comprendre que sa patience avait des limites. «Nous devons ramener la performance de Perrier à un niveau raisonnable dans les deux ans, sinon on fragilise l'ensemble de Nestlé Waters pour une marque qui ne génère que 6% du chiffre d'affaires.» Quatre solutions sont possibles: continuer à investir sans garantie de hausse de productivité, céder la marque à un tiers en lui refilant la patate chaude, mettre en place un plan social «traumatisant» ou revoir l'organisation avec les partenaires sociaux pour améliorer durablement la productivité tout en supprimant des emplois, principalement par des retraites anticipées. Nestlé Waters a choisi, pour l'instant, la dernière. Le groupe sera ferme. Il a fait ses comptes et juge parfaitement anormal que ses concurrents puissent atteindre 1,2 million de bouteilles produites par an et par collaborateur, alors que Perrier stagne à 600 000 bouteilles.
Critiques isolées
Nestlé a aussi été attaqué par un représentant syndical colombien qui l'accuse de ne pas lever le petit doigt contre les actions de groupes paramilitaires qui menacent les ouvriers engagés dans la fabrication de lait en poudre lorsqu'ils défendent leurs droits. Peter Brabeck a relativisé le problème en rappelant qu'il est statistiquement normal, avec plus de 500 usines et 270 000 emplois dans le monde, que Nestlé soit confronté çà ou là à quelques frictions. Il fait remarquer qu'il s'est déplacé personnellement en novembre 2003 pour discuter avec les syndicats. «Je ne tolère pas que les ouvriers critiquent la qualité des produits qu'ils fabriquent, sciant ainsi la branche sur laquelle ils sont assis.»
Quelques critiques isolées ont été faites sur le niveau des salaires des dirigeants. Rainer Gut, président du conseil d'administration, les avait anticipées en consacrant près de la moitié de son exposé inaugural à cette question. Il refuse d'aller plus loin que l'exigence des autorités boursières suisses, limitée au montant global versé au conseil d'administration et à la direction générale. «C'est du voyeurisme populiste», affirme Rainer Gut, en affirmant qu'une plus grande transparence produirait un effet contraire à celui recherché, soit la hausse des rémunérations par surenchère et le choix d'implantation des dirigeants dans d'autres pays que la Suisse. L'assemblée a en outre avalisé sans difficulté l'entrée dans le conseil d'administration de cinq nouveaux membres, dont Kaspar Villiger, ancien conseiller fédéral, et Carolina Müller-Möhl, présidente du groupe d'investissement du même nom.