Des milliers de métallurgistes ont manifesté vendredi dans les rues de Rome pour exiger un nouveau plan industriel pour Fiat Auto. Pendant ce temps, le gouvernement de Silvio Berlusconi a adopté en Conseil des ministres un texte visant à renforcer la compétitivité des entreprises. Depuis des mois, le patronat comme les syndicats réclamaient une intervention d'urgence pour enrayer le déclin industriel du pays et la crise économique. Le miracle italien autrefois célébré a en effet épuisé ses effets. Dans de nombreux secteurs, la Péninsule, depuis plusieurs années, perd du terrain. A tel point que le patron des patrons, Luca Cordero di Montezemolo, a tiré il y a quelques semaines la sonnette d'alarme: «Sans vouloir être pessimiste, je ne me souviens pas d'un ensemble de paramètres aussi négatifs depuis l'immédiat après-guerre.»

A commencer par la production qui est au bord de la stagnation. Vendredi, l'Institut italien de la statistique a révélé qu'en 2004 le produit intérieur brut (PIB) italien n'a crû que de 1,2%. Un résultat légèrement meilleur que prévu mais qui confirme globalement l'essoufflement du système économique. Au quatrième trimestre 2004, le PIB a reculé de 0,3%, record négatif de la zone euro. Avec l'Allemagne, l'Italie est désormais le mouton noir économique de l'Europe avec – différence notable par rapport aux Allemands – des résultats à l'export qui, en raison de la perte de compétitivité du «made in Italy», ne compensent nullement le ralentissement de la croissance interne.

En dix ans, la part des exportations italiennes dans le monde est tombée de 4,6% à 3%. Dans le classement de la revue Forbes, seules 42 sociétés italiennes sont classées parmi les 2000 entreprises les plus importantes du monde contre 67 pour la France, 132 pour la Grande-Bretagne et 36 pour la Suisse, qui est pratiquement dix fois moins peuplée.

De Fiat Auto à Alitalia en passant par Parmalat, nombre des fleurons de l'industrie italienne sont dans la tourmente. D'autres sont la proie des colosses étrangers (Edison, le groupe sidérurgiste Lucchini, etc.) au point que certains parlementaires évoquent le risque d'une colonisation. Les marges de manœuvre budgétaires qui, pendant des années, ont permis à Rome de doper la croissance du pays à travers les déficits se sont considérablement réduites en raison de l'intégration dans la monnaie unique.

Indécisions et retards

Les retards en termes d'investissements dans la recherche et le développement sont patents. L'Italie n'y consacre qu'un peu plus de 1% de son PIB, soit près de la moitié de la moyenne européenne. Quant au dialogue social entre le patronat et les syndicats qui, tout en ayant montré certaines limites, avait offert à l'Italie stabilité et gestion économiques à moyen terme, il a été battu en brèche par l'actuel gouvernement de Silvio Berlusconi. Au-delà, la majorité de droite, traversée par des courants de pensée hétérogènes, n'a pas été en mesure d'adopter des réformes substantielles, en particulier sur la régulation des marchés financiers, une loi promise depuis le scandale Parmalat qui a éclaté il y a plus d'un an.

Vendredi, après des mois de discussions, le Conseil des ministres a finalement approuvé un plan de relance de la compétitivité des entreprises. Le paquet de mesures vise notamment à faciliter les rapprochements entre petites et moyennes entreprises (PME), à lutter contre les délocalisations et à favoriser la recherche à travers des aides aux entreprises dans ce domaine. Attendu également depuis des mois, un projet a été adopté pour réformer la loi sur les faillites, par un gouvernement qui affiche son optimisme pour l'évolution de la croissance industrielle. La Ligue du Nord (populiste) souhaitait aller plus loin dans l'intervention avec la mise en place de mesures antidumping pour lutter principalement contre la concurrence chinoise qui taille des croupières à l'industrie italienne du secteur. Sujet de polémiques entre les différentes composantes de la majorité, la proposition a été repoussée.

Pour le patronat italien, ces décisions prises pour relancer la compétitivité vont dans le bon sens, mais l'urgence réclame «des mesures de caractère structurel». L'opposition de gauche parle, elle, d'un «texte tardif et inadéquat» qui «manque de ressources». Les syndicats ont également critiqué l'orientation du texte et invitent le gouvernement à rétablir la concertation sociale.