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Lors de la célébration du titre de champion du monde de l’analyse financière obtenu par HEC Lausanne, Gary Baker, directeur du CFA Institute, évalue la formation en finance et déplore la faible proportion féminine dans la profession, notamment à la direction

L’exploit n’est pas mince. L’équipe d’étudiants de HEC Lausanne s’est imposée à Kuala Lumpur lors du championnat mondial d’analyse financière 2018 que représente la compétition organisée par le CFA Institute Research Challenge. Le concours regroupe un millier d’universités et plus de 5000 étudiants. Mardi soir, à Zurich, ce titre exceptionnel a été fêté en présence de nombreuses personnalités.
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Les ingrédients du succès ont aussi été disséqués par Norman Schürhoff, le professeur lausannois qui a accompagné l’équipe.
Retweeted Eelco Fiole (@Eelco_Fiole):
— CFA Switzerland (@cfa_ch) June 12, 2018
Swiss celebration today in Zurich of the winners of the research challenge this year from @heclausanne ! Very proud guys, congrats! Cc @garybaker @cfa_ch @CFAinstitute @Paul_Smith pic.twitter.com/6L7cYJBzdU
Lors d’une interview, Gary Baker, directeur général du CFA Institute pour l’Europe, révèle «une amélioration massive du niveau de la recherche au cours des dernières années, tant en Europe qu’en Suisse».
En Chine, davantage de femmes que d’hommes
L’association à but non lucratif CFA Society décerne un certificat très exigeant et intensif (environ 300 heures de travail par an, mais moins coûteux qu’un MBA), puisque le taux de réussite n’est que d’un candidat sur six. Les financiers helvétiques apprécient. La Suisse est le deuxième plus grand pays d’Europe en termes de membres, avec plus de 3000 diplômés.
L’examen évolue toutefois. «Nous désirons absolument que nos examens soient pertinents pour que les étudiants soient préparés aux métiers des cinq ou dix prochaines années», déclare Gary Baker. Par ailleurs, le CFA cherche à accroître la participation féminine. «Il a longtemps été difficile d’attirer les filles à la finance. C’est une erreur. Elles disposent d’une immense gamme de compétences que nous devrions inclure», observe le Londonien, fort de ses trente ans d’expérience tant dans l’analyse financière que dans la gestion, dont vingt ans passés chez Merrill Lynch.
En Europe, la participation féminine au CFA est inférieure à 20%. L’avenir appartient à une plus grande égalité des genres, selon son dirigeant. «En Chine, il y a davantage de candidates que de candidats», révèle Gary Baker. L’association entend multiplier les efforts dans ce sens. Le premier aspect consiste à élargir le pipeline, c’est-à-dire attirer les filles à la finance, par exemple avec l’aide de stages dans les entreprises. Il s’agit toutefois surtout, à son avis, de soutenir les femmes par des mesures de reconnaissance et d’avancement dans l’entreprise. L’absence de femmes à la tête d’entreprises financières est une lacune majeure, reconnaît-il.
Les talents de la finance, à l’évidence très mobiles, sont l’objet d’une concurrence mondiale acharnée. «La croissance asiatique est telle en finance que les détenteurs chinois de CFA sont déjà les plus nombreux, même devant les Américains», explique Gary Baker.
Besoin d’élargir le savoir
Les examens de CFA s’adaptent continuellement aux nouveaux thèmes de la finance, à commencer par la finance comportementale, ainsi que l’intelligence artificielle, et au Big Data.
L’intelligence artificielle est en train de changer les métiers de la finance. Elle permet de réduire le temps alloué au traitement des données grâce à l’automation. Elle force aussi l’analyste à utiliser ces données à des fins non traditionnelles, avance Gary Baker. «Mais si dans un jeu d’échecs, une machine est capable de battre un humain parce qu’elle gère correctement des données structurées, en finance c’est plus improbable parce que les marchés financiers sont fonction d’interactions de différentes origines», ajoute-t-il.
L’avenir du financier devrait appartenir aux spécialistes des techniques financières, capables de gérer de vastes montants de données, mais aussi aux professionnels au bénéfice d’un savoir étendu à d’autres disciplines, de l’histoire à la géographie en passant par les langues. C’est un défi, selon Gary Baker. «Il est facile d’enseigner la finance à une personne, mais nous ne pouvons pas enseigner la curiosité et la soif de connaissances.»