Mardi soir, le constructeur allemand Volkswagen a communiqué que des «incohérences inexpliquées» sur les émissions de CO2 avaient été découvertes sur environ 800 000 véhicules. Les risques économiques de cette révélation pourraient atteindre les deux milliards d’euros, selon le constructeur, qui a précisé qu’un moteur essence était aussi incriminé.

Cette annonce intervient alors que Porsche, marque de luxe du groupe VW jusqu’alors épargnée, a, elle aussi, été rattrapée lundi soir par le scandale des moteurs diesel truqués. Une accusation venue des États-Unis est tombée au moment où le patron de Porsche, Matthias Müller, venait de prendre la direction du groupe Volkswagen avec pour mission de faire toute la lumière sur le scandale qui agite le groupe depuis septembre.

L’agence de protection de l’environnement américaine (EPA) a affirmé au sujet des modèles de luxe du groupe que «Volkswagen (VW) – la maison mère de Porsche – a une fois de plus manqué à ses obligations de se conformer aux lois qui protègent la qualité de l’air que respirent les Américains.» L’EPA, qui avait incriminé en septembre les émissions des moteurs 1,2, 1,6 et 2 litres de cylindrée de Volks­wagen, s’attaque cette fois aux moteurs 3 litres des véhicules haut de gamme du groupe aux 12 marques.

Une nouvelle série de tests menés par l’agence américaine, ainsi que par ses homologues canadienne et californienne, a révélé que des logiciels de manipulation des émissions de gaz toxiques auraient été installés sur les moteurs diesel des grosses cylindrées de luxe Audi A6 Quattro, A7 Quattro, A8 et A8L, Q5 et Porsche Cayenne ainsi que des VW Touareg. L’EPA a découvert dans les véhicules contrôlés «un logiciel de contrôle des émissions de type AECD (Auxiliary Emission Control Device), pour lequel le constructeur n’a pas fourni d’informations suffisantes» lorsqu’il a demandé l’autorisation de circulation des véhicules sur le sol américain.

Tests aussi trafiqués pour les grosses cylindrées du groupe

Normales en mode de test, les émissions de ces grosses cylindrées dépassent les normes sur les routes. «Une seconde exactement après la fin des tests, moteurs et émissions des véhicules retrouvent un mode de fonctionnement normal et les émissions d’oxyde d’azote sont d’un coup neuf fois supérieures aux normes autorisées aux États-Unis», résume l’EPA. Les logiciels AECD ne sont pas formellement interdits. Mais les constructeurs ont l’obligation d’informer les autorités sur leur fonction exacte. 10 000 véhicules de modèles 2014 et 2015 vendus aux États-Unis seraient concernés par ce nouveau scandale, ainsi qu’un nombre indéterminé de modèles 2016.

«Il s’agit évidemment d’une mauvaise nouvelle pour Volkswagen, dans la mesure où cette dernière accusation inclut également Porsche», estime Holger Schmidt, analyste d’Equinet. Matthias Müller, le patron de Porsche, vient en effet d’être nommé à la tête du groupe avec pour mission de faire toute la lumière sur le scandale. Sa crédibilité risque d’être entachée. «Le rôle de Matthias Müller apparaît sous un jour nouveau, souligne le quotidien Süddeutsche Zeitung dans un commentaire. Après la démission forcée de Martin Winterkorn, il avait été appelé à Wolfsburg en tant que «manager propre», non concerné par le scandale.»

Adoptant un profil bas, Porsche a pour l’instant fait part de sa «surprise». «Nous avons des preuves flagrantes des violations», a rétorqué l’EPA, ajoutant que les investigations «se poursuivaient». Les ventes du groupe ont reculé de 0,7% en octobre et VW a enregistré au troisième trimestre sa première perte trimestrielle depuis plus de 15 ans. Volkswagen a commencé à brader ses voitures. Les prix de la Golf ont chuté jusqu’à 29% sur Internet. «L’effet Volks­wagen se fait sentir sur le marché des véhicules neufs, constate le spécialiste du secteur Ferdinand Dudenhöffer, de l’Université de Duisburg. Même si on ne note pas encore un recul des ventes des moteurs diesel.»