Plus de 100 milliards de dollars récupérés
Cette «purge», qui a débuté en novembre dernier, aurait permis aux autorités de Riyad de récupérer un peu plus de 106 milliards de dollars provenant supposément d’activités liées à la corruption. Le détail de cette récolte n’a pas été précisé, mais le chiffre est, lui aussi, singulièrement proche des prédictions faites par les proches du prince héritier Mohammed ben Salmane, qui évoquaient la perspective d’obtenir 100 milliards.
«C’est un montant important, mais il devient vite moins impressionnant dans le contexte saoudien, souligne Stéphane Lacroix, professeur associé à Sciences Po et spécialiste de la région. Notez par exemple que, en 2011, la maison royale avait distribué 130 milliards de dollars pour éviter que les Printemps arabes puissent secouer le royaume. En réalité, cet exercice n’a de sens que s’il s’agit bien d’un message visant à montrer que les règles ont changé. Dans ce cas, comme on le dit à Riyad, c’est possible que les dividendes finissent par tomber à plus long terme.»
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«Climat de terreur»
Dans l’immédiat, pourtant, c’est bien plutôt d’un «climat de terreur» que se plaignent des personnalités saoudiennes, craignant d’être potentiellement les prochaines sur la liste. Nul ne parle désormais ouvertement au téléphone, et même les applications de messagerie les plus courantes ont été abandonnées au profit de Telegram et autres outils cryptés.
La semaine dernière, la libération du prince Al-Waleed ben Talal, l’un des hommes les plus riches de la planète à la tête de Kingdom Holding, qui était détenu lui aussi au Ritz-Carlton, n’a pas été de nature à apaiser les esprits. Dans une vidéo, il évoquait un simple «malentendu»: «Il n’y a pas de problème. Je suis ici à la maison», expliquait-il.
6 milliards de dollars déboursés
Selon le Wall Street Journal, Al-Waleed a dû débourser 6 milliards de dollars pour dissiper ce «malentendu». «Les négociations ont pris plus longtemps du fait qu’il a fallu réunir cette somme en se débarrassant notamment de paquets d’actions», note un connaisseur du dossier. A Davos, le ministre saoudien des Finances, Mohammed al-Jadaan, le résumait ainsi: «Ce sont des gens malins. Ils ne laissent pas leur cash dans des comptes en banque mais trouvent le moyen de cacher leur argent en le répartissant entre divers actifs.»
A ces pressions économiques s’ajoutent des mouvements aux visées potentiellement plus politiques. Ainsi du groupe de construction Ben Laden, ou des principaux groupes de médias du pays, dont le sort des responsables est encore incertain et qui pourraient passer sous la tutelle du pouvoir à Riyad faute d’un accord jugé «satisfaisant» par la maison royale.