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De retour aux affaires, les cabinets de conseil recrutent de nouveau à tour de bras

McKinsey et Accenture engagent. Pas moins de 1000 places de travail devraient être créées en Suisse dans le domaine du conseil aux entreprises d'ici à la fin de l'année. Les sociétés, désireuses de bénéficier au mieux de la reprise économique, font appel à leurs services. Le secteur ne devrait toutefois pas retrouver la folle croissance des années 90.

Il y a un mois, le 15 mars au soir, une cinquantaine d'étudiants de HEC Lausanne se retrouvaient à l'hôtel Beau-Rivage Palace. Pas de bal annuel ou de soirée estudiantine au programme en ce lundi, mais un vrai «business lunch». A l'origine de l'événement, l'un des plus grands cabinets de conseil en management actif en Suisse, McKinsey. Une première de mémoire d'étudiant. Cette opération d'envergure avait pour objectif de séduire les futurs diplômés, car McKinsey, comme ses concurrents, recrute à nouveau. Signe notable pour un secteur en crise à la sortie des années 90, l'âge d'or des consultants.

Le patron de McKinsey en Suisse, Thomas Knecht évoque dans la dernière édition de Cash l'engagement de 40 nouveaux collaborateurs pour l'année en cours. Accenture confirme la tendance articulant le chiffre de 100 places de travail et Boston Consulting de 25. Quant à Bain & Company, ils cherchent 70 consultants pour ses activités en Suisse, en Allemagne et en Autriche. Selon les prévisions optimistes de l'hebdomadaire alémanique, pas moins de 1000 emplois devraient être créés dans le secteur en Suisse sur la base d'une définition large du conseil aux entreprises (conseil sur la stratégie, l'organisation, mais aussi en informatique). Sur le campus des universités, les ateliers organisés par ces employeurs potentiels se multiplient. «La demande des sociétés de conseil devient comparable à celle de l'audit», relève Cyril Roch, responsable du Forum AIESEC de l'emploi à l'Université de Lausanne.

Un retournement de tendance qui surprend d'autant plus qu'on disait le secteur aux abois. «Certains engagent après avoir effectué à un moment donné des coupes sombres», souligne, critique, un professionnel. «Nous avons toujours eu un effectif proche de la demande afin de pouvoir réagir avec flexibilité. Nous avons par ailleurs moins recruté ces dernières années afin d'absorber les surcapacités. Nous avons repris depuis mi-2003 notre recrutement de manière intensive», répond Eric Bernheim, directeur chez McKinsey.

Ce retour aux affaires se dessine alors même que la crédibilité de la branche avait été mise à mal ces dernières années. Surfant sur la vague de la Nouvelle Economie, nombre de cabinets ont joué les enfants gâtés: solutions standardisées vendues comme des produits particuliers, consultants juniors facturés au prix de seniors et résultats parfois discutables. Conseiller en stratégie du courtier américain en énergie Enron, McKinsey a été aussi montré du doigt à l'heure du grounding de Swissair en octobre 2001. Le consultant avait inspiré à feu la compagnie nationale et son patron d'alors, Philippe Bruggisser, la stratégie du «chasseur» (rachat de compagnies) qui a été fatale au transporteur aérien.

La reprise économique est à l'origine de ce regain d'activité. Plus à l'écoute de leur client que jamais, les consultants sont prêts. «Les entreprises, qui avaient arrêté toute forme d'investissement, ont retrouvé leur fondamentaux. La première d'entre elles qui bouge disposera d'un avantage concurrentiel», observe Edgar Brandt, directeur chez BearingPoint. «Suite à l'explosion de la bulle Internet, les sociétés ont adopté une certaine prudence. Elles ont resserré les boulons. Cependant, la structure des industries, comme par exemple dans les télécoms, la bancassurance ou la santé, a continué de changer à une vitesse rapide. Les clients se demandent aujourd'hui comment exploiter ces tendances», renchérit son concurrent Eric Bernheim. Les questions de stratégie et d'innovation sont de nouveau à l'ordre du jour.

Un tremplin pour l'avenir

Si l'activité repart bel et bien, ce ne sera toutefois plus comme durant les années 90, où la croissance flirtait avec les 30% par an, prévient Edgar Brandt. Cette demande ravivée ne devrait pas laisser indifférents les futurs diplômés. Nombre d'entre eux ont fait leurs premières armes dans le conseil en management, tremplin de beaucoup de carrières. Incarnation de cette nouvelle ère, Peter Wuffli, l'actuel CEO de UBS, a remplacé Lukas Mühlemann, l'ancien patron de Credit Suisse Group, – tous deux ex-McKinsey – dans l'imagerie des consultants ayant réussi au sein de l'économie suisse.