Un retournement de tendance qui surprend d'autant plus qu'on disait le secteur aux abois. «Certains engagent après avoir effectué à un moment donné des coupes sombres», souligne, critique, un professionnel. «Nous avons toujours eu un effectif proche de la demande afin de pouvoir réagir avec flexibilité. Nous avons par ailleurs moins recruté ces dernières années afin d'absorber les surcapacités. Nous avons repris depuis mi-2003 notre recrutement de manière intensive», répond Eric Bernheim, directeur chez McKinsey.
Ce retour aux affaires se dessine alors même que la crédibilité de la branche avait été mise à mal ces dernières années. Surfant sur la vague de la Nouvelle Economie, nombre de cabinets ont joué les enfants gâtés: solutions standardisées vendues comme des produits particuliers, consultants juniors facturés au prix de seniors et résultats parfois discutables. Conseiller en stratégie du courtier américain en énergie Enron, McKinsey a été aussi montré du doigt à l'heure du grounding de Swissair en octobre 2001. Le consultant avait inspiré à feu la compagnie nationale et son patron d'alors, Philippe Bruggisser, la stratégie du «chasseur» (rachat de compagnies) qui a été fatale au transporteur aérien.
La reprise économique est à l'origine de ce regain d'activité. Plus à l'écoute de leur client que jamais, les consultants sont prêts. «Les entreprises, qui avaient arrêté toute forme d'investissement, ont retrouvé leur fondamentaux. La première d'entre elles qui bouge disposera d'un avantage concurrentiel», observe Edgar Brandt, directeur chez BearingPoint. «Suite à l'explosion de la bulle Internet, les sociétés ont adopté une certaine prudence. Elles ont resserré les boulons. Cependant, la structure des industries, comme par exemple dans les télécoms, la bancassurance ou la santé, a continué de changer à une vitesse rapide. Les clients se demandent aujourd'hui comment exploiter ces tendances», renchérit son concurrent Eric Bernheim. Les questions de stratégie et d'innovation sont de nouveau à l'ordre du jour.
Un tremplin pour l'avenir
Si l'activité repart bel et bien, ce ne sera toutefois plus comme durant les années 90, où la croissance flirtait avec les 30% par an, prévient Edgar Brandt. Cette demande ravivée ne devrait pas laisser indifférents les futurs diplômés. Nombre d'entre eux ont fait leurs premières armes dans le conseil en management, tremplin de beaucoup de carrières. Incarnation de cette nouvelle ère, Peter Wuffli, l'actuel CEO de UBS, a remplacé Lukas Mühlemann, l'ancien patron de Credit Suisse Group, – tous deux ex-McKinsey – dans l'imagerie des consultants ayant réussi au sein de l'économie suisse.