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Créée il y a six mois à peine, la jeune entreprise souhaite devenir la plateforme de référence en matière de numérisation des oeuvres d’art

Sur son écran, Alexandre Catsicas, l’un des fondateurs de la start-up vaudoise Artmyn, présente «Grammont» une œuvre de Cuno Amiet. La précision est saisissante. La peinture peut être zoomée et réilluminée ce qui lui confère à la fois texture et matérialité. Cette technologie novatrice a séduit la maison de vente aux enchères Sotheby’s qui vient de signer un contrat avec la start-up, créée il y a six mois seulement.
«La technologie d’Artmyn offrira à nos clients la possibilité de découvrir une nouvelle manière d’apprécier l’art via internet, a commenté David Goodman, vice-président chez Sotheby’s en charge du développement numérique et du marketing qui prévoit de partager cette innovation avec son public, partout dans le monde, à l’occasion de prochaines ventes aux enchères.
Projet financé par Google
Le savoir-faire a pu être développé grâce à un projet de recherche académique financé par Google. Artmyn est né dans le Laboratoire de communications audiovisuelles (LCAV) de l’EPFL, dirigée par le nouveau président de l’EPFL Martin Vetterli. La start-up a pour ambition de devenir une plateforme de référence dans la numérisation des œuvres d’art. «Je souhaite transformer Artmyn en nouveau standard et faire de notre plateforme un Spotify ou un iTunes de l’art, domaine qui n’a pas encore vécu sa transition au numérique», explique Alexandre Catsicas, l’un des fondateurs de la start-up qui a fait partie de l’équipe gagnante du concours de l’IMD Startup Competition.
A cette occasion, elle a pu partir une semaine dans la Silicon Valley. Non seulement la jeune entreprise est parvenue à convaincre sur place le fonds de capital-risque Polytech Ventures d’investir dans le projet mais en plus, les dix executive MBA qui accompagnaient les jeunes pousses en Californie, ont décidé de se regrouper pour soutenir financièrement Artmyn. Au total, la société a levé 1,2 million de francs, une somme qui lui permet aujourd’hui de démontrer de l’intérêt de sa technologie en signant des contrats avec non seulement Sotheby’s mais aussi Axa Partners.
Concrètement, Artmyn a développé un scanner spécifique qui photographie les œuvres d’art sous différents points de vue et avec différentes illuminations. Les images sont alors introduites dans un algorithme de calcul, puis les informations sont traitées pour permettre d’obtenir une vue tridimensionnelle de l’objet. Nous pouvons numériser des œuvres jusqu’à deux mètres sur deux, avec une résolution de 1200 dpi», explique Loïc Baboulaz, un ingénieur de l’EPFL et co-fondateur d’Artmyn. Parmi les réalisations, on peut citer celle du papyrus Bodmer II – un des plus anciens manuscrits connus du Nouveau Testament – qui a été, numérisé en trois dimensions pour la fondation Martin Bodmer.
Intérêt des musées et assurances
«Notre outil aide à comprendre la topographie d’une œuvre. Les experts peuvent étudier un tableau, par exemple, sans se déplacer», note Alexandre Catsicas, un entrepreneur de 30 ans qui était actif dans le trading des matières premières avant de faire une thèse en histoire de l’art puis travailler chez Christie’s. Des musées ou des galeries prévoient aussi d’intégrer ce système interactif à leur exposition pour présenter à leurs visiteurs ou aux acheteurs potentiels des œuvres trop sensibles à la lumière, quasiment impossibles à déplacer ou difficiles à apprécier sans entrer dans les détails.
«En numérisant des œuvres qui partent en exposition, il est aussi possible de vérifier à leur retour si elles ont été endommagées. C’est ce qui intéresse les compagnies d’assurances», ajoute Alexandre Catsicas.
Artmyn, qui compte actuellement une équipe de quatre personnes, a l’intention de louer son matériel aux galeries, musées, assurances ou maisons de vente aux enchères. La start-up prévoit de plus que doubler ses effectifs d’ici la fin de l’année et d’ouvrir rapidement un bureau aux Etats-Unis.
Artmyn, mode d'emploi
Pour observer les détails du «Grammont» de Cuno Amiet, il faut cliquer sur le lien, zoomer sur le tableau et activer la luminosité, symbolisé par une petite lampe. En déplaçant la souris, on accède à la topographie du tableau.