une journée à londres
La Confédération n’est pas considérée comme une juridiction non coopérative en matière fiscale. Mais elle sera, comme le Luxembourg ou l’Autriche, jugée sur ses actes par un G20 décidé à en finir avec le secret bancaire.
Les mots sont clairs. L’engagement est pris. «L’ère du secret bancaire est finie», assène dans son article 15, le communiqué final du G20. Après avoir réaffirmé la volonté commune des pays représentés à Londres «d’agir contre les juridictions non coopératives, incluant les paradis fiscaux» et, s’il le faut «de recourir à des sanctions pour protéger les finances publiques et le système financier».
Comment? En s’appuyant sur la liste de l’OCDE divisée en trois catégories: les pays et entités qui coopèrent, ceux qui ont promis d’appliquer l’article 26 du modèle de convention fiscale de l’organisation, et ceux qui n’ont encore rien fait. Une liste «blanche, grise, et noire», dont beaucoup espéraient, côté suisse qu’elle ne verrait pas le jour, notamment grâce aux objections de la Chine et du Brésil, réticents envers les actions «coup-de-poing» occidentales.
Car la pression, désormais, ne devrait pas se relâcher: «La liste grise sur laquelle figure la Suisse, mais aussi Andorre, Monaco ou le Luxembourg, expliquait ravi Nicolas Sarkozy à la sortie de la réunion, regroupe les pays qui ont amorcé un mouvement dans la bonne direction, mais qui, s’ils s’arrêtent en route, retomberont dans la troisième, à savoir la liste noire des juridictions non coopératives que nous frapperons de sanctions». Figureraient aussi dans cette zone grise, l’Autriche, la Belgique, le Luxembourg, Singapour, Hongkong et Macao.
Les distinctions sont néanmoins clairement établies. Gordon Brown les a d’ailleurs rappelées: «Nous voulons la fin des paradis fiscaux qui ne transmettent pas d’informations sur demande», a précisé le premier ministre britannique, rejetant par conséquent les appels à la généralisation de l’échange automatique d’informations qui s’élèvent déjà au sein de l’Union européenne.
Sauf que le fait d’être listé, même en gris, comporte des risques et des contraintes. Le G20 veut des résultats avant sa prochaine rencontre au niveau des chefs d’Etat et de gouvernement, en septembre à New York. Ce qui semblait ravir, hier, le redouté ministre allemand des Finances Peer Steinbrück: «Je suis très curieux expliquait-il aux côtés d’Angela Merkel de voir ce que la Suisse va mettre sur la table pour prouver qu’elle n’a pas seulement fait un effet d’annonce. Ce n’est pas le moment de jouer la montre».
Qui dit liste dit aussi comparaisons. Or bien que juridiquement logiques, certaines font mal. Plusieurs sources européennes ont ainsi affirmé au Temps qu’au moins trois territoires dépendants britanniques – Jersey, Guernesey et l’Ile de Man – souvent dénoncés pour leurs pratiques fiscales et pour l’opacité de leurs «trusts» par le Luxembourg, devraient se retrouver «blanchis» dans la première catégorie. Motif: tous ont signé à la hussarde, ces dernières semaines, plus de douze conventions d’échanges d’informations avec des pays membres de l’OCDE, le seuil exigé par l’organisation pour être jugé «coopératif».
Reste le bas du tableau. Celui occupé par les Etats et juridictions sur lesquels les ministres des Finances du G20 sont priés «de proposer des sanctions» dès leur prochaine réunion dans quinze jours. S’y trouveraient, en plus de nombreux confettis insulaires traditionnellement pointés du doigt par l’OCDE, des pays comme les Philippines, la Malaisie, le Guatemala, l’Uruguay ou le Costa Rica. Plus les îles Caïmans. Une vraie «liste noire» de juridictions pour lesquelles «tout reste à faire».