Tous les frigos romands comptent au moins une brique de lait. Mais lorsqu’elle est vide, l’affaire se complique: si on ne veut pas la jeter dans la poubelle taxée, alors où peut-on le faire? En Suisse romande, pratiquement nulle part, puisqu’il n’y a que deux points de collecte, qui se trouvent dans le canton de Vaud.

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En théorie, les Genevois devraient donc aller jusqu’à Payerne ou Oleyres pour déposer leurs briques. Mais ils ne le font pas, peut-être pour éviter de polluer au volant, et à la place, mettent ces fameuses briques dans la mauvaise poubelle. Du gâchis, estime Simone Alabor, la directrice générale de l’association pour le recyclage des briques à boisson en Suisse, dont les membres fondateurs sont les trois leaders du secteur: Tetra Pak, SIG Combibloc et Elopak Systems.

«Il existe bien une usine de recyclage des briques alimentaires en Suisse, écrit-elle en réponse à nos questions. Il s’agit de l’usine Model AG, située à Weinfelden, qui a la capacité de valoriser les 20 000 tonnes de briques consommées chaque année en Suisse, et même beaucoup plus.» Mais l’installation tourne à vide car, selon Simone Alabor, seule une petite partie de ces briques sont collectées et acheminées jusqu’à cette usine.


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Pollueur-payeur

En matière de recyclage, la Suisse applique le principe du pollueur-payeur: c’est aux fabricants d’organiser la deuxième vie de leurs emballages. Cela fonctionne déjà notamment pour le PET, où une contribution anticipée de recyclage est ajoutée au prix de vente afin que les industriels organisent la collecte et le recyclage du matériau. Rien de tel pour les briques alimentaires, où aucun système n’est encore prévu.

Il y a trois ans, Aldi décidait, seul, de collecter gratuitement toutes les briques à boisson en Suisse en vue de les recycler. Le groupe, dépassé par les quantités, a finalement jeté l’éponge et cessera de les accepter dès le 30 juin prochain. «Bien que cela soit possible d’un point de vue technique, aucun autre acteur du marché ne s’est laissé inspirer par notre engagement concernant le recyclage, a regretté Fabienne Magee, directrice de la responsabilité d’entreprise chez Aldi Suisse. Et ce, bien que 70% des briques à boisson que nous avons collectées provinssent d’enseignes concurrentes.»

75% de papier

Pourtant, le recyclage des briques à boisson est devenu beaucoup plus facile suite au développement de nouvelles techniques. En trempant les briques dans de l’eau, Tetra Pak parvient ainsi à en extraire les 75% de pulpe de papier. Le reste, composé de plastique et d’aluminium, peut être brûlé puis transformé. Mais le fabricant, bien qu’il ait un siège à Pully, n’a pas jugé bon d’implanter sa méthode en Suisse.

A Bâle et en Thurgovie, deux projets locaux réclament le recyclage des briques de lait. Mais au parlement fédéral, aucun projet n’est en cours pour remédier à cette lacune. Les fabricants de briques le disent eux-mêmes: «Il paraît inconcevable que ce qui est possible depuis des décennies chez nos voisins ne le soit pas en Suisse, un pays où les consommateurs plébiscitent précisément le recyclage.»