La Suisse fait un pas pour mieux encadrer l’exportation de produits dangereux
Pesticides
Tandis que s’élèvent des critiques contre la livraison de pesticides interdits en Suisse vers l’étranger, Berne prévoit d’imposer aux exportateurs d’obtenir le consentement du pays de destination. Une mesure jugée insuffisante

Leur dangerosité est attestée. C’est la raison pour laquelle certains produits comme l’atrazine et le paraquat, entrant dans la composition de pesticides, figurent sur la liste des substances interdites en Suisse. «Leur évaluation par les autorités a montré que leur emploi présentait un risque inacceptable pour la santé humaine ou pour l’environnement», écrit l’Office fédéral de l’environnement (OFEV).
Pourtant, comme le dénonçait encore en début de semaine l’ONG Public Eye, ces produits peuvent franchir les douanes helvétiques pour être livrés vers des pays tiers. Face aux critiques et à la suite d'une motion déposée par la députée verte genevoise Lisa Mazzone, visant à interdire l’exportation de plusieurs produits dangereux, Berne a fait un pas: le Conseil fédéral a mis en consultation le mois dernier une révision de sa législation sur les produits chimiques.
Ce projet élargit l’obligation d’obtenir le consentement explicite du pays de destination à cinq produits: l’atrazine et le paraquat, mais aussi le diafenthiuron, le méthidathion et le profenofos.
En retard sur l’Europe
Cette obligation d’autorisation, découlant de la Convention de Rotterdam, dont la Suisse est signataire, vient se substituer à la simple obligation d’informer, qui prévaut aujourd’hui pour ces cinq substances, par ailleurs interdites sur sol helvétique. Ce faisant, la Suisse s’aligne en outre sur la réglementation européenne, ce qui n’est pour l’heure pas le cas.
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«C’est un premier pas, mais clairement insuffisant», regrette Lisa Mazzone. Se contenter d’une autorisation du pays de destination présente est immoral car on continue d’exposer des populations à des substances que l’on considère trop dangereuses en Suisse, selon la motionnaire: nombre de ces substances sont livrées dans des pays dans lesquels la population n’est pas bien protégée. «La France a l’intention d’interdire ces exportations, nous devons en faire de même», insiste la conseillère nationale. «D’autant plus que la Suisse abrite le numéro un mondial de l’agrochimie Syngenta, elle se doit de prendre ses responsabilités», conclut-elle.
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Au total, entre 2011 (introduction de l’obligation d’annoncer) et 2017, la Suisse a envoyé en moyenne 168 notifications d’exportation par an dont 74 concernent des matières actives de pesticides. En termes de volumes, la moyenne annuelle est de près de 145 tonnes de pesticides, estime la Confédération, sans donner le détail des substances exportées. La consultation sur la révision de la législation durera jusqu’au 21 juin.