D Magazine l’a surnommé le «new Uber». Dans son édition d’avril, le média texan spécialisé dans les contenus lifestyle s’émouvait qu’Alto, un nouveau service de voiturage dit premium soit lancé par «deux Dallasites natifs». Derrière le gentilé, qui désigne le grand Dallas et ses 8 millions d’habitants, on retrouve pourtant le fonds d’investissement Road Ventures, domicilié à Genève. Il cherche aujourd’hui à lever entre 20 et 30 millions de francs avant fin août pour développer sa flotte de 50 voitures.

«On s’attaque au marché par le haut», précise le Valaisan Patrice Crisinel, membre du conseil d’administration et trésorier d’Alto. Lancée en mai 2018, l’application jure mettre à la disposition de ses utilisateurs des conducteurs qualifiés, dont le casier judiciaire a été épluché, et qui – à la différence du concurrent Uber – sont reconnus comme des employés. Autrement dit: Alto paie leurs cotisations sociales et un salaire de 15 dollars par heure.

Les femmes et les «bros» de la tech

Une relation contractuelle qui «permet de filtrer» les mauvais profils, selon Patrice Crisinel. Il espère ainsi pouvoir convaincre les femmes qui se disent encore réticentes à utiliser Uber pour des raisons de sécurité. Elles ne seraient que 38% à monter dans de tels types de transports, alors que près d’un homme sur deux est un utilisateur, selon Alto.

«Nous vous maintenons en sécurité, vous définissez la mélodie», promet la devise d’Alto. Au rayon des gadgets, l’application permet de verrouiller les portes à distance, de géolocaliser et de partager son trajet avec ses proches, ainsi qu’une option «ne pas déranger», destinée au conducteur, ou la possibilité de programmer sa propre musique à l’avance. Peut-être de quoi séduire les employés du secteur technologique, attirés à Dallas par la hausse des loyers en Californie et aussi par les incitations fiscales visant leurs employeurs.

Une carte de membre face à Uber

Il en coûte 12,95 dollars par mois aux utilisateurs pour pouvoir bénéficier des services d’Alto. En plus du prix de la course, dont Patrice Crisinel promet qu’il sera «30% moins cher que celui d’Uber Black». Soit quelque 13 dollars pour 3 miles (4,8 kilomètres) ou quelque 50 dollars pour un trajet depuis l’aéroport de Dallas, distant de 20 miles (32 kilomètres), selon son catalogue de prix.

Avec ses 50 véhicules, Alto – qui a choisi de cibler le cœur de Dallas avant de s’étendre à d’autres villes – ne pèse pourtant pas lourd face à Lyft et à Uber. La première (1,4 million de chauffeurs) a réalisé son entrée en bourse fin mars et est désormais valorisée à 24,3 milliards de dollars, la seconde (3 millions de conducteurs) devrait réaliser la sienne avant la fin du mois. «Il y a de la place pour un troisième acteur, défend Patrice Crisinel. Nous ne visons à terme que 3 à 5% du marché américain.» Ce qui représente entre 1,35 et 2,25 milliards de dollars sur les 45 milliards générés par l’économie des voitures avec chauffeur d’ici à 2025, selon les projections d’Alto.

Transition vers la rentabilité

La société revendique un taux d’occupation de ses véhicules de 11% en mars. «Alto sera rentable lorsque ce taux atteindra 25%», selon Patrice Crisinel. Sa société s’est dotée du même logiciel de gestion de flotte que Bestmile, basée à Lausanne, pour ses navettes autonomes.

Celui qui siège au sein des deux conseils d’administration rappelle que le modèle d’affaires de cette dernière, qui a mené en 2015 un projet pilote avec La Poste à Sion, est basé sur l’exploitation du logiciel, pas sur la construction de navettes. «Bestmile gagne de l’argent sur le nombre de miles roulés, admet-il. Alto l’aidera à assurer la transition vers la rentabilité, dans dix-huit à vingt-quatre mois.»