Automobile
Le constructeur allemand a avoué des «irrégularités» dans les chiffres donnés pour l'émission de gaz polluants, qui concerneraient 800 000 voitures. Le titre chute de 9%

La sanction a été immédiate en bourse, où le titre perdait 9,10% à 100,90 euros à 12H00 GMT, amenant à près de 40% sa chute en six semaines. Le constructeur allemand Volkswagen a admis mardi soir avoir constaté –dans le cadre de son enquête interne sur les moteurs diesel truqués- des irrégularités sur les émissions de CO2 de certains de ses véhicules. 800.000 voitures seraient concernées, pour la plupart des moteurs diesel, mais aussi –pour la première fois depuis le début du scandale- des moteurs à essence. Les véhicules concernés figurent parmi les plus grosses ventes du groupe. Il s’agit de Polo, Golf et Passat de la marque VW, d’Audi A1 et A3, du modèle Octavia de Skoda ainsi que des Leon et Ibiza de Seat. Le quotidien Frankfurter Allgemeine Zeitung citant mercredi des documents internes à VW donnait en exemple la Golf Blue Motion, qui émet en réalité 100 grammes de CO2 par kilomètre, au lieu des 90 grammes mentionnés sur la fiche technique du véhicule.
Le groupe n’a pour l’instant révélé aucun détail sur les pays concernés, poussant la Commission européenne, très pointilleuse sur les émissions de CO2, à faire monter la pression sur le groupe : « On doit clarifier sans délai quels types d’irrégularités au CO2 ont été découvertes, la cause, les véhicules concernés, où ils ont été enregistrés, quelles mesures le groupe va prendre pour remédier à la situation », a insisté Lucia Caudet, porte parole de la Commission. La commission a le pouvoir d’imposer des pénalités aux constructeurs automobiles qui ne respecteraient pas les objectifs de réduction d’émissions de CO2 qui leur ont été imposés. Le plafond imposé par les normes européennes est de 130 grammes par kilomètre, et doit baisser par étapes à 95 grammes par kilomètres à l’horizon 2025. L’Allemagne, soucieuse de protéger son industrie automobile spécialisée dans les berlines haut de gamme, avait longtemps freiné les négociations à ce sujet.
Contrairement au scandale des moteurs truqués – équipés d’un logiciel capable de réduire les émissions d’oxyde d’azote en phase de contrôle anti-pollution - Volkswagen n’est pas cette fois accusé de manipulation mais de mensonge : les véhicules incriminés consomment tout simplement 20 à 30% de carburant supplémentaire que ce qui figure sur la fiche client. Les émissions de CO2, non nuisibles pour la santé mais responsables du réchauffement climatique, sont elles aussi bien supérieures à ce qu’assure le constructeur à ses clients. Ceux-ci risquent en Allemagne d’être confrontés à une hausse de leur taxe automobile, dont le montant dépend du niveau des émissions.
Ce nouveau scandale dans le scandale pourrait coûter au groupe 2 milliards d’euros, en plus des 6,7 milliards déjà provisionnés en prévision de la remise aux normes des 11 millions de véhicules concernés par les émissions d’oxyde d’azote.
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Nouvelles accusations américaines
Lundi, l'agence américaine de protection de l'environnement, qui avait la première révélé la tricherie, a accusé le groupe allemand d'avoir violé les normes d'émission de gaz polluants également avec des moteurs diesel 3 litres des marques Audi, Porsche et Volkswagen.
Jusqu'à maintenant le trucage n'était avéré que pour de plus petits moteurs, de 1,2, 1,6 et 2 litres, et ne concernait aux Etats-Unis que les marques VW et Audi. «Il s'agit évidemment d'une mauvaise nouvelle pour Volkswagen», a réagi mardi Holger Schmidt, analyste d'Equinet, «dans la mesure où cette dernière accusation inclut également Porsche».
Le patron sur la sellette
Or le nouveau patron de Volkswagen, Matthias Müller, qui a pris les rênes au pied levé au moment de l'éclatement du scandale, était précédemment à la tête de Porsche et «a dû avoir connaissance de ce problème, même si cela reste encore à prouver», avance l'analyste.
Matthias Müller a promis de faire la pleine lumière sur l'affaire, d'en gérer les suites et de redorer l'image du groupe. Volkswagen doit rappeler toutes les voitures concernées et les remettre aux normes, ce qui lui coûtera des milliards, et va faire face à une kyrielle de procès.
Selon l'EPA, au moins 10 000 véhicules seraient concernés aux Etats-Unis par les nouveaux soupçons. En Allemagne, «les moteurs diesel en question sont déjà soumis à des tests supplémentaires conduits par l'agence fédérale des transports. (...) Dès que cet examen sera terminé seront alors présentés les résultats complets», a promis le ministère des Transports.
Volkswagen a affirmé qu'aucun programme n'avait été installé sur ces moteurs pour modifier de «manière inappropriée» les tests antipollution. Les moteurs sont «conformes à la loi», a renchéri mardi sa filiale Audi.
Le groupe ne s'explique pas ces nouvelles accusations, et va «coopérer complètement avec l'EPA, afin d'expliquer totalement les faits». La procédure va se poursuivre avec de nouveaux tests et pourrait déboucher sur des rappels de véhicules.
Plus de 18 milliards de dollars de pénalités
La question des pénalités menaçant VW, qui pourraient théoriquement dépasser 18 milliards de dollars (16 milliards d'euros) rien qu'aux Etats-Unis, sera elle aussi abordée plus tard.
La facture du scandale est déjà lourde. Le groupe a annoncé la semaine dernière avoir enregistré au troisième trimestre sa première perte trimestrielle depuis plus de 15 ans (1,67 milliard d'euros). Un trou imputable aux 6,7 milliards d'euros de provisions mises de côté par le groupe pour faire face au scandale.