Etienne Jornod ouvre la porte de son grand bureau lumineux au sommet de la tour Galenica, implantée en bordure d'une zone industrielle proche du centre de Berne. Pas un bruit. Le téléphone fixe reste muet durant près d'une heure. Le téléphone portable, posé sur une place de travail à l'autre bout de la pièce, est réglé en mode silencieux. L'ordinateur reçoit, sans signal sonore, des dizaines d'e-mails.
Le patron du groupe pharmaceutique dégageant plus de 2 milliards de francs de chiffre d'affaires par an livre le secret de ce troublant silence. «Tous les téléphones passent par mon assistante qui les filtre. Moins de dix personnes, dont les cinq membres de la direction générale, connaissent mon numéro de téléphone portable. Mon assistante m'envoie régulièrement des SMS. C'est le meilleur moyen de me tenir au courant. En quelques mots je suis informé du degré d'urgence de la demande. Ce mode de communication simple suffit largement pour gérer un groupe comme le nôtre.»
Une telle gestion des informations trahit-elle un manque de disponibilité, avec les risques de panne de communication que cela comporte? «Pas du tout. Je fais en sorte d'être toujours atteignable, mais mon emploi du temps ne doit pas être géré par les autres. Moi seul dois pouvoir décider quand on peut me voir, prendre contact avec moi, me faire lire un document.» Et la lecture des mails, l'élimination du spam? «Je n'ouvre pas les pièces jointes, cela prend trop de temps. Une personne de confiance imprime l'ensemble du courrier informatique et je réponds plus tard, sur écran, au moment judicieusement choisi.»
«Trois fois par semaine, une marche tôt matin»
En déplacement à l'étranger, soit en moyenne un jour par semaine, Etienne Jornod se branche sur la première connexion internet venue pour lire ses courriels à l'heure choisie. Le système SMS par téléphone portable relié à l'assistante de direction fait le reste.
Autre principe antistress: «Toujours prévoir des espaces vides dans l'agenda. Je déteste devoir passer d'une séance à l'autre sans transition. Lorsqu'il y en a huit par jour c'est la catastrophe. Quatre, c'est déjà beaucoup, mais il me tient à cœur d'être toujours disponible pour chacun sur les sujets vraiment importants». Etienne Jornod utilise ces cases libres dans l'agenda pour réfléchir à la stratégie du groupe et l'élaborer sur son ordinateur. «Dans mon bureau porte fermée, devant l'écran, c'est là que je suis le plus créatif. Cela peut durer des heures.»
L'inspiration est suscitée par de longues promenades, tôt le matin ou le week-end, au bord de l'Aar et en forêt. «Trois fois par semaine, j'effectue une marche entre 5 et 6 heures du matin. De nombreuses idées me viennent à ce moment-là. Je les couche sur le papier dès mon retour à la maison».
Autre manière de déjouer l'horloge: un repas frugal (soupe, fruits) pris au bureau, et la renonciation au maximum de repas d'affaires et aux invitations officielles. «Je n'ai vraiment pas l'impression de manquer de temps», conclut le patron de Galenica.