Après Kudelski, Novartis. Une vraie «cata», selon les internautes actifs sur la page Facebook de 24 heures: «La Confédération a dépensé des millions pour un vaccin contre une pandémie qui n’est pas venue! Y a pas moyen de vacciner les faiseurs de bénéfices, banquiers, pharmas, etc., contre cette réelle pandémie de «licenciite» foudroyante?» Car cette nouvelle est bel est bien «un coup dur pour la région lémanique», écrit 20 minutes. L’économie vaudoise s’en prend plein la figure, avec des leaders qui restructurent, se réorientent. Et, du coup, licencient, comme l’a annoncé lundi Kudelski en supprimant 270 postes de travail sur ses 3000 collaborateurs.

Aujourd’hui, c’est la convergence croissante (encore elle, cette barbare!) entre le monde de la télévision numérique et celui d’Internet qui est au cœur des enjeux à relever pour cette entreprise, comme l’expliquent les sites spécialisés DigitalFernsehen.de ou AdvancedTelevision.com. Déjà que Kudelski, leader mondial de l’accès sécurisé, doit faire avec «des salaires délivrés en francs, tandis que les revenus sont encaissés en dollars et en euros». Depuis son sommet enregistré au printemps 2010, l’action de la firme vaudoise a perdu les deux tiers de sa valeur, lit-on sur le site du magazine Bilan. Et entre les 9 et 10 août derniers, «un membre du conseil d’administration de Novartis, vraisemblablement Daniel Vasella, a acquis des actions de son entreprise pour près de 62 millions de francs, d’après les données sur les transactions du management».

Mais convergence ou non, tout cela fâche le rédacteur en chef de 24 heures, pour qui «le monde politique n’est pas sans armes» et n’est pas composé de gens «à la traîne, condamnés à protester en vain, tels des Don Quichotte dérisoires». Juchés sur leur monture électorale, comme les candidats conseillers aux Etats vaudois entendus s’écharper lundi soir dans Forum de La Première de RSR? Non, pour lui, «une politique industrielle et économique est possible, et elle ne signifie pas automatiquement la liberté donnée aux entreprises de faire n’importe quoi, comme bon leur semble». Même si elles souffrent terriblement de ce satané franc qui demeure trop puissant malgré les efforts de la BNS, à en croire l’opinion très autorisée de la Neue Zürcher Zeitung sur cette problématique peu simple à appréhender pour le simple pékin.

Et pendant ce temps, face à l’inertie, «le personnel de Novartis à Nyon (VD) se mobilise pour éviter la fermeture du site, résume le site Romandie.com. Les employés ont mandaté le syndicat Unia pour défendre leurs intérêts. Ils veulent obtenir le rapport de la société d’audit qui recommande la délocalisation.» Ce, alors qu’un internaute d’Ouvertures.info juge que «le mépris et le manque de jugeote montrés par la pharma bâloise […] sont au centre de la doctrine libérale. Le credo du centre patronal et de ses affidés. Leur cœur de cible dogmatique. Sauf que ce faisant, Novartis parvient à irriter et heurter des sensibilités ordinairement de centre droit, voire […] de droite. Et à rallier à la cause du PS, qui milite pour une forme d’interdiction administrative de licenciements, nombre de déçus du PLR et même de l’UDC.»

Bref, on est – idéologiquement – dans une grosse mélasse, à la fois économique et politique, que justifient crise et force du franc. Ce franc musclé qui «défavorise évidemment moins les investissements en Suisse qu’il ne contrarie les ventes à l’étranger, explique Yvette Jaggi sur le site de Domaine public. La désindustrialisation de notre pays, où le secteur secondaire représente encore tout juste 23% des entreprises et 30% de la main-d’œuvre et une part importante des exportations, se poursuit comme chez nos voisins. Quant aux activités de services, en particulier celles du tertiaire financier, elles se caractérisent par une croissance générale et continuelle, mais fort différenciée d’une branche à l’autre. Le cas de Novartis, qui se dit entreprise citoyenne, mérite réflexion au-delà des événements en cours, significatifs des imbrications d’un capitalisme décidément difficile à surmonter.»

Mais «vouloir obliger une entreprise à attendre les chiffres rouges pour commencer à réduire ses coûts liés au personnel […] serait […] suicidaire, tant pour l’entreprise que pour le personnel dans son ensemble, rappelle pour sa part le blog «Libéralisme et atlantisme», hébergé par la Tribune de Genève. Les choix stratégiques de Novartis certes douloureux sont la conséquence d’un marché mondialisé livré à une concurrence qui oblige les entreprises pour rester compétitives et conserver le solde des emplois à tailler là où les coûts sont les plus importants. Les gesticulations de l’opinion, des médias et des politiques n’y changeront rien.»

Alors continuons à gesticuler, sinon on ne s’en sortira pas et l’«on n’en sortira pas», à en croire le blog de Jacques-André Haury qu’accueille le quotidien vaudois 24 heures: «Aussi longtemps que les financiers tenteront d’imposer leur vision virtuelle de la croissance, déplore-t-il, l’économie réelle sera sacrifiée. On voudrait que les dirigeants de nos associations économiques quittent leurs idées simplistes: c’est bel et bien le dogme de la croissance sans limite qui conduit au malheur de Nyon!»